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Transfert en Italie d'un salarié italien par un employeur étranger

Lors d’un transfert en Italie d'un salarié de nationalité italienne par un employeur étranger basé dans un pays de l’UE : quelles sont les scénarios possibles et les démarches à effectuer ?

avion vole entre deux gratte-cielavion vole entre deux gratte-ciel
Écrit par Lia Meroni
Publié le 19 février 2024, mis à jour le 28 février 2024

Lorsqu’une entreprise étrangère basée dans un État membre de l'Union européenne (par exemple, en France) mais dépourvue d'un établissement stable en Italie, souhaite transférer en Italie un de ses salariés, de nationalité italienne et avec résidence en Italie, plusieurs obligations s’imposent.

On peut distinguer deux obligations principales que l'employeur étranger doit remplir, c'est-à-dire (i) la communication à effectuer au Ministère du travail italien et (ii) le paiement des cotisations sociales dans le Pays où le salarié exerce son activité, en application du principe de la territorialité.

I) Communication obligatoire à effectuer au Ministère du travail italien ("Ministero del Lavoro e delle politiche sociali")
En cas d'embauche directe, de cessation du rapport de travail ou encore en tout cas de modification du rapport de travail du salarié (par exemple, en cas de transfert - qui nous intéresse - ou de détachement) l'employeur doit nécessairement informer le Ministère du travail par voie télématique.  
En cas d'embauche directe, cette communication doit être effectuée dans les 24 heures suivant le jour précédant celui où la relation de travail est effectivement établie (même en cas de jour férié).
En cas de transfert du salarié, cette communication doit être envoyée par l'employeur au Ministère dans les 5 jours suivant l'événement. 

Cette communication doit indiquer les données personnelles, la date d'embauche ou de transfert, le type de contrat, la qualification professionnelle et le traitement économique et réglementaire appliqué.

II) Paiement par l'employeur étranger des cotisations sociales en Italie, en application du principe de la territorialité
En matière de cotisations sociales, le principe général est celui de la territorialité, qui prévoit que le salarié est soumis au régime de cotisations en vigueur sur le territoire où il exerce son activité ("lex loci laboris"). Un régime spécial est prévu en cas de détachement.
Dans le cas qui nous intéresse, si le salarié, transféré en Italie par l'entreprise française, exerce son activité sur le territoire italien (imaginons dans sa propre résidence, n'ayant pas l'entreprise un établissement stable en Italie), les cotisations sociales doivent être versées en Italie, aux organismes compétents (c’est-à-dire l’INPS).  
S'agissant d'un Pays de l'Union européenne, d'un point de vue normatif, la législation applicable est le Règlement CE 883/2004, qui prévoit que "une personne exerçant une activité salariée ou non salariée dans un État membre est soumise à la législation de cet État membre", c'est-à-dire l'Italie (Article 11, par. a)).  
En revanche, si le salarié exerce son activité dans deux ou plusieurs États membres de l'Union européenne, il faut établir quel est le Pays dans lequel il exerce une “partie substantielle de son activité”.
À cet égard, on applique des critères indicatifs, tels que le temps de travail et la rémunération.
Dans le cadre d'une évaluation globale, c'est l'article 14 du Règlement CE 987/2009 qui entre en jeu et qui précise que, d'un point de vue quantitatif, il résulte que “l'activité substantielle" est égale à au moins 25 % de l'activité totale exercée par le salarié.  
Toutefois, il faut rappeler que, dans le cas présent, l'entreprise étrangère est dépourvue d'un établissement stable en Italie.  
D'un point de vue pratique, nous allons voir quelles sont les conséquences de l'absence d'un établissement stable (III).  

III) Quelles conséquences si l'employeur étranger n'a pas d'établissement stable en Italie ?
On se concentrera ci-dessous sur la notion d'établissement stable (A) ainsi que sur le rôle du représentant en matière de cotisations sociales, qui entre en jeu (B).

A) La notion d'établissement stable
Selon la normative italienne, l'article 162 du décret législatif n° 917 du 1986 (TUIR- Testo unico delle imposte sui redditi) prévoit que l'expression établissement stable désigne une "installation fixe d'affaires par l'intermédiaire de laquelle l'entreprise non-résidente exerce tout ou partie de son activité sur le territoire de l'État."
Le deuxième alinéa de l'article 162 précise ce qui est compris dans ladite notion, comme, par exemple, un siège de direction, une succursale, un bureau, une présence économique significative et continue dans le territoire de l'État construite de telle manière qu'elle n'y a pas de présence physique.
On retrouve la même définition d'établissement stable dans la Convention entre la France et l'Italie contre les doubles impositions en matière d'impôts du 5 octobre 1989. 

B) Le rôle du représentant en matière de cotisations sociales ("rappresentante previdenziale")
Comme déjà mentionné, en l’absence d'un établissement stable, c'est le représentant en matière de cotisations sociales qui entre en jeu.  
Il s'agit d'une personne physique ou juridique qui est nommée, par acte authentique de procuration, par l'employeur et qui est chargée d'agir au nom et pour le compte de l'entreprise étrangère, dans le respect des obligations en matière de cotisations sociales obligatoires liées aux activités du personnel salarié (Circulaire INPS n° 2 de 2007, par. 3.3.1., lettre a) – "Entreprise étrangère opérant en Italie").  
Le représentant en matière de cotisations sociales a, au nom et pour le compte de l’entreprise étrangère, les obligations suivantes :

  •     s’il n’a pas de code fiscal, en faire la demande au centre des impôts (Agenzia delle Entrate) en Italie en qualité de non-résident ;
  •     procéder à l’ouverture des comptes de cotisations à l’INPS au nom de l’entreprise étrangère (en joignant une copie de la procuration spéciale) auprès du siège compétent pour le lieu d’implantation et, si nécessaire, inscrire l’entreprise étrangère aux assurances complémentaires;  
  •     procéder à l’ouverture d’un compte INAIL (Institut national d’assurance contre les accidents du travail) auprès du siège compétent pour le lieu d’implantation. La déclaration d’activité, prévoyant la communication des informations d’état civil complètes et du code fiscal du personnel employé, doit être faite avant le début de toute activité professionnelle ;
  •    verser les cotisations sociales à l'INPS;
  •     respecter les obligations en matière de tenue des registres sociaux (livre de paie - "Libro unico del lavoro, LUL"), de versement des cotisations dues aux échéances ordinaires et de rédaction et de présentation de la certification unique (Modèle CU).

Un exemple sur la notion d'établissement stable : la Cour de Cassation, avec ordonnance n° 1977 de 2020, a admis que le domicile du représentant légal italien d'une société basée en République tchèque, domicile à partir duquel l'activité de gestion de forfaits touristiques pour la clientèle tchèque était exercée à distance, constitue un établissement stable.

 

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