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FREDERIC JAUNAULT - ''L'écosystème alimentaire, c'est profiter de l'alimentation qui nous entoure''

Écrit par Lepetitjournal Bucarest
Publié le 22 novembre 2015, mis à jour le 23 novembre 2015

Eduquer le palais des plus jeunes, améliorer la formation des apprentis cuisiniers et faire redécouvrir le plaisir du goût : deux meilleurs ouvriers français sont venus transmettre leur savoir-faire dans le cadre d'un événement organisé par le festival La Fête du Goût, alias S?rb?toarea gustului, lors du salon des hôtels et restaurants Romhotel à Bucarest, à la mi-novembre. Frédéric Jaunault est l'un d'entre eux. Primeur, c'est aussi le créateur de la première Académie du Fruit et Légume en Europe et de la première Ecole du Fruit et Légume sur le marché national de Rungis.

Photo : Jonas Mercier

Le Petitjournal.com/Bucarest - Qu'est-ce que l'éco-système alimentaire ?

Frédéric Jaunault - A force d'utiliser des mots trop scientifiques en parlant de nourriture, on en oublie la simple logique alimentaire. Aujourd'hui, nous imposons des normes pour sauver la planète, pour l'hygiène, pour tout. Et à force d'être tellement normé, on en oublie notre identité culinaire. L'écosystème alimentaire, c'est quoi ? C'est l'alimentation qui nous entoure. J'invite les gens à faire le marché et à manger en fonction de leurs envies. Apprenons de nouveau à dire : je veux manger pour le plaisir. Si on veut sauver la planète, évitons le superflu dans ce qui touche à notre alimentation. Trop de produits de consommation finissent à la poubelle. Cette logique est pour moi celle de l'écosystème alimentaire, du développement durable et elle permettra de sauver la planète.

Justement, on a du mal à faire le lien entre ce que l'on mange et le réchauffement de la planète...

Pourtant il existe. On jette des kilos d'aliments à la poubelle. Et aujourd'hui, les industriels sont fautifs de ce gâchis. Le marketing à l'excès va imposer l'emballage excessif, les étuis inutiles. Certains produits sont enveloppés dans trois ou quatre couches de plastique successives juste pour que ce soit plus joli. On en oublie le plaisir de cuisiner et de manger. En France, une célèbre pâte à tartiner monopolise le plaisir alimentaire, notamment chez les enfants. Est-ce que vous pensez que faire le marché avec son enfant pour acheter trois, quatre kilos de fraises et en faire de la confiture, ce n'est pas plus agréable, plus sain et plus écolo  ? Une fois qu'on finit ce pot de confiture, on le lave pour le réutiliser l'année d'après et il n'y a pas de déchets. Celui de la pâte à tartiner ? On le jette car c'est un emballage comme un autre.

Comment convaincre les gens de prendre le temps de cuisiner ?

Difficile. Au mois de juillet dernier, j'ai fait pour un émission de télévision deux purées de fraises. L'une avec des vrais fruits et l'autre avec de l'eau, du E450, du konjac, de la gélatine et des arômes alimentaires. 96% des gens qui ont gouté ces deux préparations ont préféré la deuxième variante. Pourquoi ? Parce que les consommateurs occidentaux sont de plus en plus formatés au goût industriel. Le pire, c'est que dans ces 96%, deux tiers se moquent de savoir que la mousse au fraises chimiques peut être dangereuse pour la santé.

Cette problématique est-elle identique dans les pays d'Europe de l'Est, comme la Roumanie ?

Elle le devient. En Europe de l'Ouest, nous sommes déjà des super-consommateurs. On a beau dire que la France est le pays de la gastronomie, mais il faut savoir que nous sommes surtout parmi les plus grands consommateurs de produits alimentaires industriels. Je pense qu'il faut garder l'âme de la bonne cuisine et savoir la transmettre. Si les pays de l'Est ne font pas attention, ils vont perdre leurs traditions, comme nous l'avons perdue. Le pot-au-feu, par exemple, est devenu un plat exceptionnel dans les familles françaises.

Avez-vous fait un marché roumain ?

Oui, plus qu'un. Et je suis vraiment conquis par ces produits très nature que l'on y trouve. Le produit paysan, j'aime ça. On se fout que la carotte est un peu tordue, que la pomme ait une petite tâche : le produit est tel qu'il a été cueilli. Chez nous, la pomme doit être bien brillante. Sur le marché roumain, il y a aussi de la fraternité, de la convivialité, de l'échange. On passe, on regarde, on parle, on est interpelé. Quand je viens sur ces marchés, je vis.

Propos recueillis pas Jonas Mercier (www.lepetitjournal.com/Bucarest) Lundi 23 novembre 2015

lepetitjournal.com bucarest
Publié le 22 novembre 2015, mis à jour le 23 novembre 2015

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