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Emmanuel Macron parle la langue de Vladimir Poutine, qu’en pensent les Polonais ?

Lundi 26 février, le Président Emmanuel Macron a réuni 27 chefs d’État et de gouvernement ou leurs représentants ministériels, à l’occasion d’une conférence de soutien à l’Ukraine, au Palais de l’Élysée ; le Président Zelensky, dans un message vidéo demandant aux dirigeants d'amplifier leur soutien. D’une voix assurée, le chef de l’Etat français a martelé que rien ne devait être exclu pour faire échec à la guerre d’agression menée par la Russie en Ukraine : munitions, systèmes de défense sol-air et missiles à moyenne et longue portée, il s’est exprimé dans une langue qui parle à Vladimir Poutine. Le Kremlin n’a pas tardé à réagir. Qu’en pensent les dirigeants polonais ?

Légende : @ELYSEE Conférence de presse du Président Emmanuel Macron à l'issue de la Conférence de soutien à l'Ukraine.Légende : @ELYSEE Conférence de presse du Président Emmanuel Macron à l'issue de la Conférence de soutien à l'Ukraine.
Capture Youtube @ELYSEE - Conférence de presse du Président Emmanuel Macron à l'issue de la Conférence de soutien à l'Ukraine
Écrit par Bénédicte Mezeix
Publié le 28 février 2024, mis à jour le 22 avril 2024

Les faits : Emmanuel Macron dans une démarche « action-réaction »

Alors qu’en 2022, aux premières heures de l’invasion de l’Ukraine, Emmanuel Macron avait assuré qu’il ne voulait pas « humilier » la Russie, le chef de l’Etat a modifié son discours, à l’occasion de ce 2e anniversaire.  D’une voix déterminée, lors de la conférence de presse à l'issue de la conférence de soutien à l'Ukraine, il a assuré, à la lumière des nouveaux événements, que « (…) Suite à l'analyse qui est la nôtre, et ce que j’avais exprimé, il y a maintenant quelques jours aux côtés du président Zelensky, dans cette salle-même, à savoir le changement de posture à nos yeux de la Russie. Je constate d'abord qu'il y a une unité de vue sur ce constat : celui que la Russie poursuit la guerre, réitère ses objectifs de conquête territoriale et a adopté une attitude plus agressive, non seulement envers l'Ukraine, mais contre nous tous en général. »

Bref, fini le temps du consensus, Emmanuel Macron parle ainsi un langage intelligible par Vladimir Poutine : celui d’ « action-réaction ».

 

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Les 27 dirigeants se sont mis d'accord autour de cinq points d'actions sur lesquelles il y a un consensus pour prendre de nouvelles initiatives :
- le cyberdéfensif ; 
- la coproduction d'armement en Ukraine ; 
- la défense de pays menacés directement par l'offensive russe en Ukraine, en particulier la Moldavie ; 
- la capacité de soutenir l'Ukraine à sa frontière avec la Biélorussie avec des forces non militaires ;
- les opérations de déminage.

 

Les réactions internationales : la levée de boucliers

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a critiqué cette prise de parole, expliquant qu’Emmanuel Macron cherche à : « infliger une défaite stratégique à la Russie ».

L’AFP rapporte que le Kremlin a jugé qu'il n'était « absolument pas dans l'intérêt de ces pays d'envoyer des soldats en Ukraine ». Le simple fait d'évoquer cette possibilité constituait  « un nouvel élément très important » dans le conflit, a rajouté le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.

Du côté de Washington, le porte-parole du conseil de sécurité nationale, John Kirby a fait une déclaration sans appel : « Il n’y aura pas de troupes américaines sur le territoire ukrainien. ». 

Au Royaume-Uni, on apprend qu’ils n’ont pas « (...) l’intention de déployer largement des troupes en Ukraine », au-delà « du petit nombre » de personnels britanniques déjà dans le pays pour « assister » les forces armées ukrainiennes. 

Le chancelier Olaf Scholz a martelé, depuis Berlin qu’ « aucun soldat ne sera envoyé » ni par les Etats européens, ni par ceux de l'Otan.

RMF24 rapporte que Robert Fico, chef du gouvernement slovaque a réaffirmé, qu'il n’y a pas de solution militaire au conflit et que la Slovaquie continuerait à se concentrer sur l'assistance civile, notamment, le déminage du pays, tout renouvelant son aide en matière de formation.

Le chef de la diplomatie française, Stéphane Séjourné, a précisé mardi 27 février,  que :

 

« Certaines de ces actions pourraient nécessiter une présence sur le territoire ukrainien, sans franchir le seuil de belligérance ». 

 

Mais qu’en pensent les Polonais, en ligne de front du conflit ? 

Le Président polonais, Andrzej Duda, a déclaré peu avant son départ à Paris : « La sécurité est ma priorité pour le moment » - „Bezpieczeństwo to jest w tej chwili mój priorytet”, soulignant que le sujet principal de la réunion était la préparation des livraisons de munitions à l’Ukraine : « L’Ukraine en a grandement besoin et le Président Volodymyr Zelensky l’a signalé à plusieurs reprises » - „Jest to Ukrainie ogromnie potrzebne i wielokrotnie zgłaszał to Prezydent Wołodymyr Zełenski”.

Après la conférence de Paris, le Président polonais, a été interrogé par le correspondant en France de RMF FM, Marek Gładys, qui lui a demandé, s’il pensait qu’il y avait de plus en plus de pays n’excluant pas la possibilité que l’envoi de soldats en Ukraine devienne nécessaire à l’avenir ? Andrzej Duda a répondu :

 

« Je peux le dire ainsi : il n’y a pas eu d’enthousiasme » - „Mogę powiedzieć tak: nie było entuzjazmu”. 

 

Quant au Premier ministre polonais, Donald Tusk, il a fait référence aux propos du Président français, selon lesquels l’envoi de troupes par les pays occidentaux n’est pas à exclure : « Je ne veux pas paraître trop dur, mais si tous les pays de l’UE s’engageaient à aider l’Ukraine, comme le font la Pologne ou la République Tchèque, il ne serait peut-être pas nécessaire de discuter d’autres formes de soutien à l’Ukraine » - „Nie chcę, by to zabrzmiało zbyt ostro, ale gdyby wszystkie państwa Unii Europejskiej zaangażowały się w pomoc Ukrainie, tak jak robi to Polska czy Czechy, to być może nie byłoby w ogóle potrzeby dyskutowania o innych formach wsparcia Ukrainy”. 

De plus, le Premier ministre polonais a souligné que la Pologne est le premier pays de l’OTAN à dépenser le plus en matière de défense : « en Pologne, nous dépenserons bientôt 4 % du PIB pour la défense » - „my w Polsce będziemy niedługo wydawali 4 procent PKB na obronność ”. 

Face au conflit ukrainien, Donald Tusk a invoqué à plusieurs reprises la force de l’Europe unie :

 

« L’Europe forte, unie et armée, prête à soutenir l’Ukraine avec des équipements, des munitions et de l’argent, voilà l’Europe qui arrêtera efficacement la Russie » - „Silna, zjednoczona, uzbrojona Europa, gotowa także do wsparcia Ukrainy sprzętem, amunicją, pieniędzmi, to jest Europa, która skutecznie powstrzyma Rosję”.

 

Malgré tout, le Premier ministre polonais a déclaré que « le moyen le plus efficace de dissuader Poutine et la Russie d’agresser serait que les Russes réalisent qu’ils ont affaire à un bloc d’Etats forts, déterminés et prêts à agir » - „najbardziej skuteczną metodą odstraszania Putina i Rosji od agresji będzie świadomość Rosjan, że mają do czynienia z blokiem państw silnych, zdeterminowanych i gotowych do działania”.

 

La sécurité collective : le rappel nécessaire 

Le président français n’a pas manqué de rappeler, lors de la conférence de presse à l'issue de la Conférence de soutien à l'Ukraine, l’importance de la sécurité collective : « (...) la possibilité pour les Européens de définir leur propre sécurité collective, un concept souvent brandi, une notion souvent avancée… c'est maintenant une réalité. La question est de savoir si nous sommes capables ou pas… Ma conviction est oui, c'était l'un des objectifs de la réunion de ce soir. »

Les nombreuses polémiques que suscitent les déclarations d’Emmanuel Macron semblent mettre en lumière, une nouvelle fois, le décalage entre ce que peuvent vivre les pays de la ligne de front avec l’Ukraine, comme la Pologne ou voisins de la Russie - remparts contre une potentielle invasion et la perception du conflit, plus à l’Ouest du continent. Défendre l’Ukraine, permet de préserver la paix européenne. 

 

 

Un article de Bénédicte Mezeix et Marcelina Cymańska

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