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SERIAL ENTREPRENEURS – La recette innovante de FastTrack en Asie.

Écrit par Lepetitjournal Singapour
Publié le 7 décembre 2015, mis à jour le 8 décembre 2015

Alexandre Olmedo et Ivan Bernard-Brunel, créateurs de FastTrack, se sont fait une spécialité d'investir dans des startups matures pour accélérer leur développement en Asie. Un modèle différent du consulting ou des Business Angels, dans lequel le duo investit et s'engage personnellement pour booster les ventes de la start-up en Asie, avant de lui céder les clés de la filiale après 3 ans.

L'un est commercial et un entrepreneur éprouvé, spécialiste en Asie du secteur de la communication, du digital et des medias, dans lesquels il a créé ou participé au développement de nombreuses start-ups, parmi lesquelles, PacketVideo, Streamezzo et eYeka. L'autre est un ingénieur devenu investisseur, passé par Alcatel en Asie, Lucent aux Etats-Unis, un fonds de capital risque Américain à Londres et ensuite revenu à Singapour pour mettre en place et diriger les activités d ?investissement direct en Asie d'Ardian (ex-Axa Private Equity).

C'est à Singapour en 2005 qu'Ivan et Alexandre se sont rencontrés. Préfigurant en quelque sorte l'aventure de FastTrack, l'une des responsabilités d'Ivan était d'aider les sociétés du portefeuille Européen d'Ardian à s'implanter en Asie. Apres avoir rencontré Alex en 2005, Ivan proposa sa candidature comme directeur des ventes  Asie pour Streamezzo, une start-up Française du portefeuille Ardian. Streamezzo fut vendu a Amdocs, Alexandre continua une autre aventure entrepreneuriale en co-fondant eYeka et Ivan continua d'investir en Asie, parcours illustré notamment par la vente réussie d'une société e-commerce Glamour Sales en Chine à Alibaba. Ils restèrent en contact pendant ces années et après quelques discussions plus poussées, Alexandre et Ivan ont créé formellement ensemble en 2014 FastTrack dont le premier investissement, dans la filiale Asie de la start-up anglaise Unruly, était récemment sous le projecteur des media avec le rachat de cette dernière par Newscorp.

Comment décrire l'approche de FastTrack?

Ivan - FastTrack est un accélérateur de start-up, nous aidons au processus de ?scale-up' pour utiliser une expression anglaise.  Notre démarche est d'aider des start-ups Européennes ou Nord Américaines de taille moyenne dans les secteurs numériques et media  à accélérer leur présence en Asie.  Pour cela, nous créons avec l'entreprise partenaire une Joint Venture que nous finançons et gérons et pour laquelle nous définissons des objectifs financiers et commerciaux typiquement à 3 ans. Si nous atteignons ces objectifs, nous pouvons échanger nos parts dans la Joint-Venture avec des parts dans le capital de la société mère, dont nous nous libérons, in fine, quand la société est rachetée ou entre en bourse.

Comment les choses se déroulent-elles

?Ivan - On investit classiquement entre un demi-million et un million de dollars dans la Joint Venture. L'idée est de monter rapidement une équipe de 4/6 personnes qui, grâce à l'effort commercial doit permettre à la JV de pouvoir atteindre l'équilibre financier au terme de la 1ere année.  L'objectif de la première année est de réaliser un chiffre d'affaires de quelques millions d'euros, puis de doubler ce chiffre d'affaires tous les ans, jusqu'à représenter environ 10% du chiffre d'affaire total de la société. La première Start-up dans laquelle nous avons investi, Unruly, vient d'être rachetée par Newscorp, 18 mois après la création de sa filiale en Asie. Dans cet exemple, le cycle a pris 9 mois entre la première rencontre en juillet 2013 et la création de la Joint Venture.

Alexandre - On commence classiquement par un "reseller agreement" afin de pitcher activement le produit en Asie. L'enjeu clé, dès cette phase, c'est de concrétiser des ventes. Cela nous confirme le potentiel de l'entreprise sur le marché en Asie Pacifique, et cela rassure  le partenaire qui voit que nous pouvons concrètement l'aider à développer son activité.

Cette période permet aussi de tester le support qu'on reçoit de la société. Idéalement, on souhaite qu'une personne de la société mère rejoigne les équipes de la filiale commune en Asie, ce qui a été le cas pour Unruly.  

Sur quels aspects êtes-vous particulièrement vigilants?

Ivan - En bonne logique d'investisseur, notre approche et les critères que nous privilégions visent à réduire au maximum les risques. Quand on investit dans une entreprise en forte croissance, les risques sont de 4 types. Il y a d'abord le risque lié aux dirigeants eux-mêmes, en termes de personnalité, d'expérience, d'engagement et de vision. Quand ces derniers ont déjà eu une première aventure commune et réussie, c'est un élément rassurant. Le second facteur de risque est de nature financière. A cet égard, il est moins risqué de s'associer à une société qui est déjà profitable. Le troisième risque est lié au produit, et le quatrième au marché. C'est encore pour minimiser les incertitudes que nous faisons le choix d'investir dans des entreprises qui ont fait la démonstration qu'elles se développent bien sur leur marché domestique, et qui ont déjà fait un effort à l'international. Ceci dit, au final c'est notre conviction intime que nous allons travailler avec les meilleurs partenaires dans leur segment et que nous allons leur offrir la meilleure capacité a se développer en Asie qui prime dans nos considérations. C'est l'aspect humain, d'entrepreneur à entrepreneur, puisque nous sommes dans une logique d'investir nos fonds personnels, qui nous intéresse aussi.

Le modèle que vous avez mis en place a-t-il des équivalents en Asie?

Alexandre - Le modèle de FastTrack est très original en Asie. Il est un peu présent au Japon. Ce que nous faisons, d'autres proposent de le faire sous une forme de consulting. Mais nous voyons à cette démarche deux limites. Soit ça marche très bien et le dirigeant d'entreprise peut très bien décider qu'il gèrera tout seul le développement de ses activités en Asie. Soit ça ne marche pas, et se pose alors un problème de rémunération des efforts mis en ?uvre par les consultants. De notre coté, nous croyons énormément à la notion d'alignement des intérêts. De la même manière que le chef d'entreprise propose des stocks options à son équipe, nous devons être impliqués et intéressés dans le développement global de la structure.

Comment êtes-vous organisés?

Ivan - Avec Alexandre, nous nous complétons bien. A Alexandre les aspects clients et validation du couple produit/marche ainsi que la relation avec les co-fondateurs de la start-up et à moi les aspects financiers et la relation avec les investisseurs. Tous les 2 nous apportons nos points de vue respectifs, très complémentaires, sur les différents risques. Par design, FastTrack est une structure légère, une holding en quelque sorte, avec nous deux et deux analystes car nous recrutons , à chaque fois, directement au niveau des Joint-Ventures. Nous sommes d'ailleurs en recherche permanente de candidats qui ont une expérience vente, si possible avec responsabilité régionale, dans le digital marketing et e-commerce et qui souhaiteraient rejoindre une aventure entrepreneuriale en prenant la gestion d'une de ces Joint-Ventures.

Y-a-t-il beaucoup de pépites disponibles pour les chercheurs d'or sur le marché ?

Alexandre - C'est difficile de trouver des pépites et c'est encore plus difficile de s'assurer que ce soit la bonne, dans laquelle nous pourrons apporter une véritable valeur ajoutée. Il faut encore, ensuite, convaincre les dirigeants de l'entreprise de travailler avec nous. D'une manière générale, on se tourne a priori vers des activités peu capitalistiques mais qui comportent des barrières d'entrée significatives. Sinon, il ne peut pas y avoir de plus-value significative en sortie lorsque l'entreprise est revendue ou entre en bourse. Il est vrai que notre modèle dépend essentiellement de notre capacité à dénicher les bonnes pépites et à et convaincre leurs dirigeants de travailler avec nous. Ceci dit, notre objectif est de travailler avec au plus 2 sociétés par an. Il y a énormément de start-ups qui se créent. Parmi celles-là, très peu (de l'ordre de quelques %) ont un véritable potentiel qui leur permettra d'aller en IPO ( introduction en Bourse) ou de se faire racheter. En tout état de cause, cela nous donne l'opportunité de travailler avec des entrepreneurs passionnants.

Propos recueillis par Bertrand Fouquoire (www.lepetitjournal.com/singapour) mardi 8 décembre

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