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PORTRAIT D’ENTREPRENEUR – Paul Guillaumot, fondateur et CEO de Spare Parts 3D

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Impression 3D par dépôt de matière fondue, ou procédé FDM - Fused deposition Modeling
Écrit par Cécile Brosolo
Publié le 28 mars 2017, mis à jour le 7 avril 2017

A 28 ans, Paul Guillaumot dirige la start-up « Spare parts 3D » qu'il a créée il y a bientôt deux ans. Adepte d'arts martiaux, il a été séduit par Singapour et a choisi de vivre ici sa passion et de se lancer dans l'expérience entrepreneuriale dont il a toujours rêvé. Spare Parts 3D propose à ses clients industriels une solution de production en temps réel de leurs pièces détachées, grâce à l'impression 3D.

www.lepetitjournal.com/singapour - Quel est votre parcours et comment avez-vous décidé de créer votre start-up ?

Paul Guillaumot
Paul Guillaumot - Je suis ingénieur Arts et Métiers. J'ai commencé ma carrière professionnelle en tant que consultant, d'abord pour un grand groupe américain, Oliver Wyman, avant de suivre quatre collaborateurs dans leur aventure entrepreneuriale, pour créer le cabinet de conseil Theano advisors. J'étais leur premier employé et lorsque je suis parti, deux ans après, nous étions 40 consultants, c'était une belle expérience.

Après 3 ans dans le conseil, j'ai eu envie de me tourner vers quelque chose de plus concret, de plus opérationnel. Et puis, j'ai grandi dans une famille d'entrepreneurs et j'ai toujours voulu créer mon entreprise. Mon objectif en arrivant à Singapour fin 2014 était de monter un projet dans un domaine technique à fort potentiel, avec un business modèle très « scalable », qu'on puisse déployer de façon assez large. J'ai pu obtenir mon Employement Pass, effectuer mes recherches, monter mon business plan et enfin lancer mon activité, en mai 2015, grâce au soutien financier de mes anciens patrons, Theano advisors. 

Qu'est-ce qui vous a amené à Singapour ?

- J'ai découvert Singapour en 2010 lorsque je suis venu pour un stage pendant mes études, et j'ai adoré la ville. Ce fut une vraie découverte, un choc culturel. Je pratique les arts martiaux depuis l'âge de 5 ans et c'est finalement le Kung-Fu qui m'a poussé à venir m'installer à Singapour.


Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots l'activité de Spare Parts 3D ?

- Il s'agit d'offrir à nos clients une solution efficace pour produire leurs pièces détachées à coût maîtrisé, en temps réel et partout dans le monde, grâce à l'impression 3D.

Space Parts 3D

La gestion des pièces de rechange implique souvent des difficultés de gestion des stocks, des fournisseurs, et de logistique, et des coûts importants. Les industriels doivent aussi faire face aux problèmes d'obsolescence, de délais d'approvisionnement, ou encore de coûts de production trop élevés, notamment lorsque la série est limitée et qu'il faut investir dans moule.

Pour vous donner un exemple, un grand groupe électroménager comme Electrolux gère environ 500 000 références de pièces détachées différentes. Plus de 90% d'entre elles cassent peu souvent et sont vendues moins de 200 fois par an. Mais lorsque ça arrive, il faut pouvoir livrer la pièce très rapidement, et n'importe où dans le monde. Cela représente donc un nombre énorme de pièces et une gestion très complexe pour peu d'occurrences. Notre solution est alors très intéressante.

Pourquoi avez-vous choisi l'impression 3D ?

Space parts 3D - 3D printing
- De part ma formation d'ingénieur, j'ai une bonne connaissance des procédés de production des pièces mécaniques, et je suis convaincu depuis très longtemps que l'impression 3D va révolutionner notre façon de produire des objets. De la même façon qu'internet a changé notre comportement de consommateur et décentralisé notre accès à l'information, l'impression 3D va induire une décentralisation, une relocalisation, de la chaine de production.

A partir d'un simple design 3D sur ordinateur, vous pouvez créer un objet partout dans le monde. Aussi, avec une seule imprimante 3D, vous pouvez produire n'importe quelle pièce, ce qui n'est pas le cas des procédés industriels classiques, et en particulier pour le plastique avec le moulage. Enfin, l'impression 3D permet la personnalisation de masse : vous pouvez produire en série, et dans des temps extrêmement écourtés, des pièces fonctionnellement identiques mais personnalisées selon les envies du client (couleur, finition, détails différents, ?).

La technologie existe depuis une trentaine d'année et a longtemps été réservée pour le prototypage, pour gagner en temps et en coût de développement de nouveaux produits. Depuis que les premiers brevets pour les plastiques sont tombés dans le domaine public, il y a 7-8 ans, les technologies ont été améliorées et plus largement utilisées. Cet accès à la technologie à un moindre coût offre des opportunités de business différentes pour la production de pièces finales, et c'est ce vers quoi j'ai voulu m'orienter avec Spare parts 3D. 


Pourquoi avoir choisi pour commencer le marché de niche des pièces détachées plastiques dans l'électroménager ?

- Le marché de la pièce détachée électroménager représente 9 milliards d'euros, et celui de la pièce détachée plastique imprimable, c'est 450 millions d'euros, réparti sur seulement 15 groupes industriels qui s'intéressent à l'impression 3D. On peut donc raisonnablement espérer gagner 10% de ce marché d'ici 3 à 4 ans, et 50% en 5 ans, en ayant une offre très spécialisée et performante. 

Quels sont vos principaux challenges aujourd'hui ?

- Nous sommes au début de l'aventure, et nous avons de nombreux challenges ! Nous sommes notamment en train de créer de notre réseau de sous-traitants pour pouvoir imprimer les pièces partout dans le monde. On recherche des entreprises qui ont déjà des machines et qui sont en sous-production, et on les qualifie pour que la pièce finale soit identique, quel que soit son lieu de fabrication. On s'assure qu'ils travaillent avec les mêmes machines que nous et qu'elles sont calibrées avec notre process, qu'ils utilisent les mêmes matériaux d'apport, et que le procédé de production est exactement le même.

A ce stade, nous avons cinq entreprises qualifiées et une vingtaine en cours, en Asie du Sud-Est et en Europe. Notre objectif à court terme est de monter à 60 sous-traitants prêts à imprimer d'ici juin. Nous travaillons pour l'instant avec une seule machine, mais nous ferons ensuite le même processus avec d'autres machines pour faire grossir notre réseau de manière exponentielle dans les années à venir.

Avez-vous des concurrents ?

- Bien que de nombreuses entreprises fassent de l'impression 3D, nous n'avons pas de concurrent direct qui propose le même service que nous. Notre concurrent est en fait l'injection plastique, le procédé de production historique de pièces détachées plastiques à faible coût. Notre défit est de gagner la confiance des industriels et de démontrer que notre fonctionnement est plus intéressant en termes de coûts, de souplesse et de fiabilité, sur l'ensemble de la chaine, de la production à la livraison finale.

Des concurrents potentiels intéressants sont les grandes entreprises de logistique comme Jabil, Foxconn, ou  Flextronics qui sont des spécialistes de la supply chain, et ils disposent déjà de centres de distribution partout dans le monde qui intègrent des étapes de production ou d'assemblage de produits. Ils ont par ailleurs bien compris que l'impression 3D avait un potentiel de changer leur business et ils investissent beaucoup dedans.

Quelle est votre vision à long terme pour Spare parts 3D ?

- Le c?ur de notre business restera toujours  les pièces détachées. A long terme, nous irons vers d'autres secteurs d'activité en élargissant notre gamme de machines et de matériaux. On suit de près en ce moment l'évolution de la technologie et des machines autour du procédé par frittage laser, ou SLS, dont le brevet est tombé dans le domaine public en 2014, et qui va permettre un nouveau virage important pour l'impression 3D avec les métaux.

Tous les industriels s'intéressent à l'impression 3D et il y a aujourd'hui un consensus sur le fait que cela va exploser pour la production des pièces détachées dans les 5 prochaines années. L'enjeu pour nous est d'être prêt à ce moment là ! 

Propos recueillis par Cécile Brosolo, (www.lepetitjournal.com/singapour), Mercredi 29 mars 2017

 

Pour en savoir plus : http://spare-parts-3d.com 

 

Relire notre article  COOPERATION SCIENTIFIQUE ? Vers l'impression 3D à l'échelle nanométrique

 

 

Cecile Brosolo
Publié le 28 mars 2017, mis à jour le 7 avril 2017

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