L'Espagne s'embourbe dans le lisier… Aux protestations des agriculteurs se joignent celles des routiers qui ont décidé ensemble de paralyser le pays. Problème pour le gouvernement: Ces mobilisations ont lieu à l'écart des organisations officielles qui soutiennent peu ou pas ces protestations.
Les agriculteurs et les transporteurs se sont mis d'accord samedi pour maintenir une grève illimitée jusqu'à ce que le gouvernement prenne en compte leurs revendications. Derrière ces mouvements, deux organisations en marge des syndicats officiels. Elles pourraient être rejointes cette semaine par le collectif des pêcheurs.
Dans le cas des agriculteurs, il s'agit de la Plateforme 6F. Le 6 Février, du nord au sud, d'est en ouest, les tracteurs espagnols ont soudain pris en masse les routes avec un objectif clair: bloquer la circulation pour faire entendre leur voix. Pourtant, quelques jours avant, le 30 janvier dernier, les organisations majoritaires agricoles en Espagne ASAJA, COAG et UPA décidaient de mettre en place un calendrier de manifestations qui devaient débuter le 8 février.
Or, la plateforme 6F, qui utilise massivement les réseaux sociaux (whatsapp, Telegram, TikTok), a sorti un manifeste qui fait allusion à la "passivité des syndicats agricoles", en référence claire à la position d'organisations telles que la COAG, l'UPA et l'Asaja qui ne soutiennent pas ces protestations. Lola Guzmán, une agricultrice valencienne qui a appelé à la mobilisation via son compte sur le réseau social TikTok, est devenue de fait la porte-parole de cette nouvelle Plateforme 6F des agriculteurs et éleveurs, créée "ad hoc" pour ces manifestations.
Objectif : paralyser l'Espagne
Quant aux routiers, ils s'agit de la Plateforme nationale de défense du secteur des transports, l'organisation minoritaire de chauffeurs routiers qui avait bloqué l'Espagne pendant trois semaines en 2022. Comme pour les agriculteurs, cette plateforme – qui représenterait plus de 85% du secteur- agit en marge des organisations officielles telles que le Comité national du transport routier (CNTC) ou la Confédération espagnole du transport de marchandises (CETM). En 2022, le gouvernement ne les avait pas appelés à la table de négociations, alors qu'ils étaient à l'origine de la grève illimitée, qui avait ensuite été rejointe par le reste des routiers. Et l'histoire semble se répéter puisque le président de la plateforme nationale de défense du secteur des transports accuse le gouvernement de les "mener au conflit en ne s'asseyant pas pour les écouter".
Les 12 revendications des agriculteurs espagnols: 1. Abaisser les exigences de la nouvelle PAC agro-environnementale imposée. 2. Réduction de la charge bureaucratique 3. Abrogation de l'Agenda 2030 4. Engagement de ne pas réduire le rabais fiscal sur le diesel agricole. 5. Abrogation de la loi sur le bien-être animal 6. Abrogation des lois sur la protection de l'environnement et des espèces, qui menacent l'agriculture, l'élevage et les zones rurales. 7. Respect de la loi sur les prix, afin que l'agriculteur ne soit pas contraint de vendre à perte. 8. Exigence du respect du contrôle phytosanitaire de la réglementation européenne pour tous les produits entrant en provenance de pays tiers. 9. Engagement dans une politique de gestion de l'eau cohérente avec les besoins de chaque territoire. 10. Etiquetage clair avec les pays d'origine des produits, le prix à l'origine et le prix final. 11. Imposition de droits de douane sur l'entrée de produits provenant de l'extérieur de l'UE. 12. Engagement en faveur de la recherche et du développement contre les pratiques de géo-ingénierie du climat, qui sont si préjudiciables au secteur.
Agriculteurs et routiers espagnols, même combat!
La porte-parole de la plate-forme 6F a insisté sur le fait que "le ministre de l'agriculture doit rencontrer le ministre des transports et que lorsqu'ils auront obtenu leurs revendications, ils rentreront chez eux". Les deux organisations ont également souligné qu'"aucun parti politique ne nous appelle ici, nous ne voulons aucune organisation, ni agricole, ni politique, ni quoi que ce soit d'autre. C'est le peuple contre les dirigeants, contre les politiciens".
Et les manifestations des syndicats officiels commencent
A ces protestations se joignent désormais la vingtaine d'actions officielles, à l'appel de la COAG, de l'Asaja et de l'UPA) qui ont commencé le 8 février à Avila, Salamanque, Ciudad Real et Huesca ; le 9, à Zamora, Bilbao et en Estrémadure ; le 13, à La Rioja et Saragosse ; le 14, à Tolède, Guadalajara, Jaén, Séville, Palencia et Soria ; le 15, à Castellón ; le 21, à Murcie ; le 22, à Aragón et Cadix ; et le 23, à León.
Vers des problèmes d'approvisionnement?
Conséquence logique, la grande distribution craint que la protestation agricole n'ait des répercussions sur la distribution de leurs produits. Certaines entreprises signalent déjà des retards et des incidents à l'entrée et à la sortie de leurs bases logistiques en Catalogne, à Madrid, en Castille et Léon et au Levant. La grève des routiers ne va faire qu'empirer les choses. Rappelons qu'il y a deux ans, leur grève illimitée, qui avait duré 3 semaines, avait bloqué l'Espagne et provoqué de gros problèmes dans les chaines d'approvisionnement.
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