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Malgré les divisions l'Espagne prolonge l'état d'alerte jusqu'au 25/05

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Pool Moncloa
Écrit par Perrine Laffon
Publié le 6 mai 2020, mis à jour le 6 mai 2020

Le Congrès des députés espagnols a validé mercredi le prolongement de l'état d'alerte demandé par le président du gouvernement. La mesure passée in extremis représente vraisemblablement la dernière prolongation de cet état d'alerte exceptionnel lié à la crise du Covid-19.

 

"L'état d'alerte est imprescriptible pour l'étape de sortie du confinement, il n'y a pas d'autre alternative possible car il faut limiter les déplacements" avait déclaré mardi le ministre de la Santé Salvador Illa, à la suite du Conseil des ministres. Le Président espagnol Pedro Sánchez a en effet demandé un quatrième prolongement de l'état d'alerte, pour deux semaines supplémentaires, en s'appuyant sur les recommandations des experts médicaux. Après négociations, la  mesure a été validée in extremis aujourd'hui lors de la session du Congrès des députés, avec 178 votes pour, 75 votes contre et 97 abstentions


De longues négociations pour faire passer la mesure

Le gouvernement socialiste avait besoin d'au moins une majorité simple pour confirmer le prolongement de l'état d'alerte en Espagne. Sur les 350 députés espagnols, le président Sánchez n'avait pu s'assurer hier le soutien que de 160 députés : 120 du parti socialiste, 35 de Unidas Podemos, ainsi que les votes des députés de PRC (Cantabrie), Teruel Existe, Más País et Compromís. Le doute planait encore mardi sur les décisions du parti Ciudadanos (10 députés) et du parti nationaliste basque PNV (6 députés). Dans la soirée, le gouvernement a réussi à obtenir l'appui des dix députés de la formation orange représentée par Inès Arrimadas, en cédant aux demandes du groupe liées aux mesures économiques : Sánchez et Arrimadas ont passé un accord pour que le gouvernement négocie conjointement les mesures du plan de transition, notamment pour conserver les ERTE et les aides économiques aux entrepreneurs après l'état d'alerte. Pedro Sánchez s'est aussi engagé à maintenir des contacts hebdomadaires avec Ciudadanos sur l'avancée de la crise sanitaire. 


Un déconfinement co-gouverné

Pour faire accepter sa mesure de prolongation de l'état d'alerte, le Président du gouvernement espagnol a dû changer son fusil d'épaule. Après d'importantes négociations, Pedro Sánchez a accepté de rendre aux gouvernements régionaux un minimum d'autonomie. En effet, depuis le début de l'état d'alerte, les communautés autonomes se sont vues retirer leur pouvoir et leurs compétences pour appliquer les lois nationales. Les décisions et leurs applications sont centralisées depuis le 16 mars, une situation exceptionnelle en Espagne où chaque région possède sa propre autonomie. "Le déconfinement sera asymétrique et co-gouverné, les communautés autonomes auront un rôle protagoniste dans la sortie du confinement. Elles remettront au ministère de la Santé leurs propositions et auront une certaine capacité  d'interprétation des règles établies" a finalement déclaré aujourd'hui Pedro Sánchez. Les gouvernements régionaux pourront donc récupérer une partie de leur autonomie afin de gérer le reste de la crise sanitaire dans leurs communautés et d'appliquer des stratégies de déconfinement variées. Cette mesure fut décisive pour s'assurer le soutien de plusieurs groupes comme le PNV (parti nationaliste basque) qui avait imposé cette condition au gouvernement pour soutenir la demande de prolongement.


Un prolongement qui passe difficilement 

Même en situation de crise sanitaire, les politiques espagnols semblent avoir du mal à s'entendre, préférant de lourds débats houleux plutôt que de faciliter des accords en temps de crise. Dans les partis d'opposition, les députés de Vox, de Junts per Catalunya, et de la CUP, qui avaient déjà refusé de prolonger l'état d'alerte lors du dernier vote, ont réaffirmé leur opposition. Le groupe parlementaire Esquerra Republicana de Catalunya (ERC) s'est joint au mouvement du "non", afin de protester contre la centralisation du pouvoir imposée par l'état d'alerte. 

La décision du Partido Popular restait encore inconnue mercredi matin. Le parti d'opposition avait assuré qu'il ne soutiendrait pas ce nouveau prolongement, sans pour autant préciser si le vote de ses 88 députés serait un "non" ou une abstention. Finalement, le représentant du parti Pablo Casado a annoncé une abstention, en précisant bien que ce serait la dernière fois : "Si vous n'êtes pas capable de trouver un plan B dans les prochaines semaines, ne demandez plus le soutien de l'opposition" a-t-il averti. La décision du PP fut également motivée par l'assouplissement du gouvernement sur les sujets des compétences régionales pour la sortie du confinement, et du maintien des aides financières aux entreprises après l'état d'alerte. 

La mesure a pu être approuvée en majorité absolue grâce au soutien de dernière minute de Ciudadanos et du PNV, et à l'abstention du PP.