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Magda Portal: la célèbre poétesse péruvienne

Mariantonieta Magdalena Julia del Portal Moreno, plus connue sous son diminutif Magda Portal fut la première femme péruvienne poétesse et politicienne.

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Magda Portal (source: “Lee Poesía”)
Écrit par Sébastien Eloi Gil Robalino
Publié le 3 avril 2024, mis à jour le 4 avril 2024

 

Magda Portal est née en 1900 à Barranco, à l’époque une station balnéaire, où résidaient de nombreux artistes, lui attribuant son caractère bohème. Bien qu’elle venait d’une famille plutôt privilégiée, son enfance fut marquée par la pauvreté et des drames douloureux, comme la mort de son père alors qu’elle n’avait que 5 ans. Cela poussa la famille à déménager à Callao, où ils vivaient grâce aux travaux de couture que réalisait sa mère.

Leur situation économique était si précaire que même leur maison fut saisie à cause des nombreuses dettes qu’ils avaient contracté. Cela poussa Magda à travailler très jeune, d’abord comme assistante dans un studio photographique puis dans un studio de litographie. C'est cette étape difficile de son existence la poussa à s’engager politiquement plus tard, pour améliorer les conditions de vie des plus démunis dans un pays inégalitaire. 

Néanmoins, elle a eu la possibilité de rejoindre la Universidad Nacional Mayor de San Marcos (UNMSM) en 1917 comme “étudiante libre” . A cette époque encore, les femmes ne pouvaient pas étudier formellement dans cette institution. C’est au cours de ces années universitaires qu’elle se lia d’amitié avec de futurs grands poètes comme César Vallejo ou Alcides Sepulín. C’est aussi à cette période que débute sa carrière littéraire. Son premier poème intitulé “En voz baja” étant publié en 1920 dans la revue littéraire “Mundial”.

En 1923, elle gagne les concours floraux de la UNMSM avec une série de trois poèmes. Pourtant, ce concours suivait une tradition issue du Moyen Âge. Seuls les hommes pouvaient gagner ce concours et devaient ensuite écrire un poème en l’honneur d’une dame. Les organisateurs décidèrent donc de créer une catégorie spéciale pour elle. 

Durant cette période, elle eut une fille, fruit d’une courte relation avec le poète Federico Bolaños. Plus tard, c'est avec son nouveau conjoint, le poète Serafín Delmar qu'elle lança le premier journal de littérature avant-gardiste appelé “Flechas”.

Elle participe à cette époque assidûment à la revue “Amauta” de son grand ami, le penseur et politicien José Carlos Mariategui. Il croit en elle et la pousse à publier son premier recueil de poèmes “Una esperanza y el mar”  qui reçut de nombreuses éloges dans le livre emblématique “7 ensayos de interpretación de la realidad peruana” . Elle y est caractérisée par son ami comme “la première poétesse du Pérou” .

 

“Con su advenimiento le ha nacido al Perú su primera poetisa” (Avec son avènement, est né au Pérou sa première poétesse),  José Carlos Mariategui

Auparavant, il y a bien eu des femmes qui écrivaient de la poésie, mais c’était une poésie en essence masculine. Les thématiques qui y étaient abordées étaient masculines ou alors reproduisaient le rôle traditionnellement attribué à une femme : le rôle de mère, d’épouse ou de fille. Magda Portal marque alors un précédent historique dans la poésie péruvienne, mais aussi latino-américaine, puisqu’elle fait de la femme, un objet poétique en lui même, éloigné de cette poésie masculine.

 

“Ni piedad, ni ternura solamente, en su poesía se encuentra todos los acentos de una mujer que vive apasionada y vehementemente, encendida de amor y de anhelo y atormentada de verdad y de esperanza” (Ni de pitié, ni de tendresse seulement, dans sa poésie on trouve tous les accents d’une femme qui vit passionnement et avec véhémence, pleine d’amour et de désir et tourmentée par la vérité et l’espoir )  nous dit José Carlos Mariategui

Voici un  poème de Magda Portal : 

Ven, bésame!...

qué importa que algo oscuro

me esté royendo el alma

con sus dientes?

Yo soy tuya y tú eres mío… bésame!...

no lloro hoy … Me ahoga la alegría,

una extraña alegría

que yo no sé de dónde viene.

Tú eres mío … ¿Tú eres mío? 

una puerta de hielo

hay entre tú y yo:

tu pensamiento!

Eso que te golpea en el cerebro

y cuyo martillar

me escapa… 

Ven bésame …. ¿Qué importa?

Te llamó el corazón toda la noche, 

y ahora que estás tú, tu carne y tu alma

qué hé de fijarme en lo que has hecho ayer? … ¡Qué importa! 

Ven, bésame … tus labios,

tus ojos y tus manos…

Luego… nada.

Y tu alma? Y tu alma! 

 

Marta Portal
Photographie de Magda Portal (source: el Comercio)

 

Une grande politicienne au Pérou

Malgré sa grande amitié avec José Carlos Mariategui, Magda Portal fut une des fondatrices du parti politique APRA (Alliance Populaire Révolutionnaire Américaine), un parti de gauche, mené par Víctor Raúl Haya de la Torre. Il est un des principaux penseurs politiques du Pérou, une figure historique de grande importance. A ce moment là, Magda et son conjoint Serafín Delmar avaient été expulsés du pays et s’étaient réfugiés au Mexique, où fut fondé le APRA. Elle y resta jusqu’à la chute du gouvernement de Augusto Leguía, en 1930. Suivant les conseils de Haya de la Torre, elle laisse sa carrière littéraire pour se concentrer exclusivement à ses activités politiques et à la direction du parti.

Pourtant, dans un contexte de forte persécution contre les membres du APRA, elle fut emprisonnée à plusieurs reprises par les autorités, l’obligeant à s'exiler à nouveau, cette fois-ci au Chili, ne revenant au Pérou qu'en 1945, lorsque le APRA fut légalisé à nouveau, le sortant de la clandestinité. Mais peu de temps après, elle quitta définitivement le parti en affirmant que celui-ci avait commencé à adopter des postures conservatrices. 

 

 

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