Alma Brami est romancière, comédienne et dramaturge. Elle vit depuis des années à Hong Kong et s’apprête à monter sur scène en avril dans "L’Abribus". À cette occasion, nous l’avons rencontrée pour qu’elle nous parle de la pièce au bénéfice de l'association "Pour un Sourire d'Enfant" et de son rapport à l’écriture à Hong Kong.
Alma Brami sera sur scène du 18 au 20 avril pour interpréter Isa, une célèbre comédienne extravagante qui tombe en panne et fait la rencontre à un abribus d’Éric – interprété par Jean-Baptiste Peloux – un agriculteur nonchalant. C’est Agnès Seelinger, metteuse en scène, qui a dirigé L’Abribus, une pièce écrite par Philippe Elno. L’intégralité des recettes seront reversées à l’assocition « Pour un Sourire d’Enfant » (PSE) qui aide les enfants du Cambodge à sortir de la pauvreté.
Quand j'écris un roman, je travaille beaucoup à l'oral
Vous venez de publier votre huitième roman Ils sont moi, je suis eux, et vous serez sur scène en avril dans L’Abribus. Est-ce que vous vous sentez plus romancière, dramaturge ou comédienne ?
Quand j’écris un roman, je travaille beaucoup à l’oral, ce que je ne ferais pas si je n’étais pas comédienne. Et je n’écrirais pas les mêmes pièces si je n’étais pas romancière. J’aborde les pièces de théâtre d’une façon très détaillée, psychologique. Par exemple, dans l’écriture du théâtre, j’accorde beaucoup d’importance au silence, et ça, ça me vient du roman.
En tant que comédienne, j’interprète une partition qui a déjà été créée et je suis guidée en plus pour l’interpréter. Il y a la question de désir, vouloir jouer avec les uns les autres, monter ce projet ensemble. Quand j’écris, je suis seule, absolument seule. Personne pour me rassurer, m’encourager, me montrer le chemin. J’aime donc être les trois : romancière, dramaturge et comédienne. Ça me permet de prendre du recul, et de trouver un certain équilibre.
C’est extraordinaire de se sentir utile
En avril, vous allez donc jouer dans L’Abribus. Pouvez-vous nous parler de cette aventure théâtrale ?
Cela parle de deux solitudes qui n’arrivent pas à se rencontrer, à se comprendre, enfermées dans leur souffrance respective et puis évidemment, comme c’est une comédie, un dialogue s’enclenche et la situation se dénoue joyeusement. La recette intégrale de L’Abribus sera reversée à PSE, Pour un Sourire d’Enfant, une association qui aide les enfants du Cambodge sur le long terme, à être scolarisés, éduqués, protégés. C’est extraordinaire de se sentir utile grâce à l’art.
Le partenariat avec le Lycée Français International permet aux élèves d’être impliqués dans le projet. Les classes de 4e ont travaillé en arts plastiques sur l’affiche, ce qui était intéressant, c’est qu’ils avaient tous une perception différente de la pièce. On va sans doute faire des ateliers, parler de théâtre, d’écriture, répondre à toutes les questions. Cela réveillera peut-être des vocations ! C’est génial de transmettre sa passion !
Le théâtre me procure beaucoup de joie
Pouvez-vous nous parler du processus de création de L’Abribus ?
Agnès Seelinger, grande actrice de théâtre et metteuse en scène, a initié le projet. Nous avions énormément envie de travailler ensemble depuis notre rencontre, il y a deux ans. Et quand elle m’a proposé L’Abribus cela m’a semblé évident. J’ai rencontré Jean-Baptiste Peloux lors de la première lecture, et on a tout de suite ri, le dialogue était naturel entre nous, et l’envie de foncer dans cette histoire et de passer quelques mois tous les trois, aussi !
Agnès, Jean-Baptiste et moi avons d’abord travaillé à la table, il s’agit de lectures approfondies où l’on commence à esquisser les personnages et la mise en scène. JB et moi avons ensuite appris le texte consciencieusement, seuls. Puis nous nous sommes retrouvés sur le plateau pour proposer nos idées et nous laissés guider par la mise en scène d’Agnès. Au début des répétitions, on avait l’impression de connaître la pièce sur le bout des doigts et peu à peu, avec les indications, les déplacements, les accessoires, on a perdu le texte. Cela a pu être un peu perturbant. On a composé et recomposé comme on pouvait, jonglant avec les intentions, le sous-texte, modifiant les phrases. D’une séance de travail à l’autre, on a eu la sensation de détricoter ce que l’on avait établi auparavant, en pensant que tout s’effondrait.
Au delà du personnage, il y a soi
Il s’agit là exactement du processus théâtral. Une couche s’ajoute à la précédente sans l’annuler. C’est ce travail qui permet aux personnages de s’étoffer, et que la relation entre eux, s’étoffe également. Une fois que la mise en scène est intégrée, que les mouvements nous appartiennent, le texte revient alors, et la pièce prend corps enfin. C’est jubilatoire ! Ce qui est fabuleux quand on joue, c’est qu’il y a le personnage qui a été écrit et puis il y a soi. Le travail d’acteur c’est d’aller vers le personnage et de faire venir le personnage à soi et c’est la rencontre entre les deux qui permet de créer le rôle. C’est pour cette raison que chaque rôle est si différent en fonction des acteurs qui l’incarnent.
Quand on monte sur scène, on appartient à un groupe, on appartient au texte, on doit servir le projet. Le lien entre les comédiens est quelque chose de formidable, on ne se connaît pas, et pourtant, on doit s’écouter immédiatement, se regarder, se soutenir et se donner confiance mutuellement. On s’appuie l’un sur l’autre sur scène, on se rattrape, on se protège. Ce que j’adore avec le théâtre, en tant que comédienne, c’est la joie que ça procure. On est dans un laboratoire, et on cherche ensemble, on essaye, on tâtonne, on crée un truc qui n’appartiendra qu’à nous. Agnès, Jean-Baptiste et moi sommes en pleine élaboration, comme des petits chimistes ! On est en train de trouver notre formule magique à nous pour vous offrir le meilleur sur scène !
Je suis émerveillée par Hong Kong
Quels liens entretenez-vous avec Hong Kong ?
À partir de 2009, j’ai souvent été invitée à faire des tournées littéraires en Chine et en 2013, j’ai terminé mon périple ici, à la librairie Parenthèses. Je suis restée 24 heures à Hong Kong, sous les pluies torrentielles et la moiteur de juillet, et j’ai éprouvé un bonheur absolu. J’y suis retournée en décembre de la même année, pour quelques jours et je ne suis plus jamais repartie.
Je suis parisienne et je ne cesse d’être éblouie par Paris, je suis toujours émue comme une touriste peut l’être. L’architecture, les immeubles, les porches, l’esthétique, la lumière, les ciels… Et j’éprouve une sensation similaire à Hong Kong, je suis touchée par cette ville. Chaque fois que je dois voyager, je ressens un manque et je suis impatiente de rentrer.
J’adorerais pouvoir jouer régulièrement
Quels sont vos futurs projets ?
Tout d’abord, « L’Abribus » en avril. On bosse intensément et minutieusement ! Mon album jeunesse, Je ne veux plus être un loup, sera publié à la rentrée 2024. Ma pièce, Max, sera sur scène à Paris début 2025. En ce moment, je travaille avec Karine Silla, sur le scénario de l’adaptation au cinéma de mon roman Qui ne dit mot consent. Et je suis en train d’écrire un monologue pour le théâtre. Après, je plongerai dans un nouveau roman.
Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour l’avenir ?
J’adorerais que le jeu devienne régulier dans ma vie. Avoir d’autres projets avec Agnès, avec Jean-Baptiste, jouer, jouer, jouer, beaucoup. Continuer à écrire bien sûr, et surtout ce que l’on peut me souhaiter d’essentiel, c’est que les gens que j’aime aillent toujours bien.
L’Abribus
Les 18, 19 et 20 avril à 20h
Lycee Français International - Campus de Jardine's - Price Road. Jardine's Lookout, HONG KONG
Au profit de l’association « Pour un Sourire d’Enfant »
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