Exposition photo par Elizaveta Porodina : Un/Masked

Du 26 avril au 18 août se tient au Fotografiska Berlin une exposition consacrée au travail d’Elizaveta Porodina, Un/Masked.

Née en Russie, cette artiste arrivée en Allemagne à l’âge de 12 ans a été marquée par un déracinement difficile. Elle témoigne de son vécu de la solitude, de l’isolement, l’épreuve représentée par le fait de devoir tout réapprendre dans un autre pays que le sien, où le regard et les attentes des autres ne sont pas les mêmes. Elle a toujours eu cette sensibilité à l’art ou du moins à l’expression artistique, qu’elle a exploré de pleins de façons différentes, comme à travers la peinture ou le chant. Mais sa passion pour les arts visuels et la photographie en particulier ont fini par s’imposer dans sa carrière professionnelle, révélant un talent exceptionnel.

Mode, art et psychologie pour inspirations

Un/Masked est décliné en plusieurs panneaux autour de thématiques et d’ensembles visuels. L’un d’entre eux est en noir et blanc, tout en contraste et en fantasmagorie - presque halluciné. Un autre, Dark Fairytales, présente des personnages mélancoliques, caractérisés par des costumes impressionnants, tous droits sortis de contes pour enfants.

La palette de couleur utilisée à travers l’exposition est très intemporelle, toujours très intense, trop pour paraître réaliste. On est transporté dans son monde propre, son esprit et ses émotions. Elizaveta Porodina est également photographe de mode, un regard qui se ressent dans son travail : un sens de la mise en scène, le recours fréquent aux bijoux, au maquillage - porté comme un masque - et aux tenues des modèles. On remarque beaucoup de drapés, des danseuses photographiées en mouvement.

Ses modèles, Elizaveta Porodina préfère les appeler ses muses. Car ce sont plus que de simples exécuteurs d’une pose qu’elle a prédéfinie : elle décrit ses séances photo comme des moments de recherche artistique, non statique, où elle encourage le mouvement des “muses” et prend leurs idées. Leur relation est donc importante : il faut qu’ils comprennent son idée, son univers, et qu’ils puissent aussi s’exprimer. Un ensemble de photos est consacré en particulier à une amie proche, Maggie. Maggie’s Room présente des photographies parmi les plus personnelles de l’exposition, que Elizaveta tient manifestement à cœur.

Des photos comme un miroir vers le subconscient de l’artiste

Elizaveta, avant de se lancer dans la photographie, a été formée en tant que psychologue clinicienne. Elle a cette appétence particulière pour la psyché humaine et nous renvoie une image de ce que peuvent contenir nos esprits. Elle ne nous épargne pas une perspective quelque peu cauchemardesque à certains moments, comme des songes éveillés, avec tout ce qu’ils ont d’angoissant. Ombres, flous, mélange d’images, toutes les techniques sont utilisées avec précision. Elle capture avec justesse une certaine idée de l’inconscient sans compromis pour ce qu’il y a de beau, mais aussi de laid et d’effrayant à l’intérieur de nous-mêmes. Une fenêtre ouverte sur ce qui se passe dans sa tête, pour amener le visiteur à refléter sur ses propres émotions.

Certaines images, comme celles de la section Celestials, rappellent l’imagerie classique des films de science-fiction. Des corps couverts de lumière, une atmosphère bleutée, l’impression d’être sur une autre planète. Le surnaturel laisse parfois place à des portraits plus mélancoliques, des visages blancs de femmes quasiment mariales. Des photos qui souvent s’apprécient comme des tableaux.

L’ensemble des œuvres présentées est large, varié, et passionnant. Une exposition captivante à ne pas rater cet été.

Prix d'entrée (toutes expositions) : 14/16 euros, réduit : 8 euros.