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Rencontre avec Marie Lapierre, Consule générale de France à Montréal

Nommée par décret du Président de la République en date du 14 juin 2023, la Consule générale de France à Montréal, Marie Lapierre, a pris ses fonctions le 1er septembre 2023. Lepetitjournal.com a eu l'honneur de la rencontrer, à Montréal.

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Écrit par Madeleine Donnadieu
Publié le 5 octobre 2023, mis à jour le 10 octobre 2023

Désignée par un décret émis par le Président de la République le 14 juin 2023, Marie Lapierre a assumé ses responsabilités en tant que Consule générale de France à Montréal à partir du 1er septembre 2023. Lepetitjournal.com a eu le privilège de la rencontrer dans la ville de Montréal.

 

consulat général de France à Montréal

 

Pouvez-vous vous présenter et présenter votre parcours à nos lecteurs, Français de l'étranger ? 

Je suis originaire de Nouvelle-Aquitaine, plus exactement de la ville d'Angoulême, qui est, pour l'anecdote, jumelée avec Saguenay au Québec. Un partenariat que nous apprécions. Comme beaucoup de diplomates français, j'ai fait mes études à Sciences Po, mais j'ai aussi un diplôme de l'Université de Montréal en science politique comparée. C’est un retour pour moi à Montréal puisque j'y étais il y a une petite vingtaine d'années. 

J'ai vécu sur quatre continents différents. Je suis rentrée au ministère des Affaires étrangères en 2010, mais avant ça, je travaillais dans le secteur minier en Afrique de l'Est. J’ai été très heureuse de pouvoir travailler pour l'Union européenne, pendant quatre ans. J'étais basée à Bruxelles, c'était une très belle expérience. Et juste avant d'arriver à Montréal, j'ai été au service de la première ministre à Matignon. 

 

« Notre communauté est surtout très dynamique et vraiment très diverse. Des milliers de Français viennent s'installer chaque année au Québec. La communauté française est très riche. »  Marie Lapierre. 


Quels sont, selon vous, les défis actuels auxquels vous allez être confrontée en tant que Consule au Canada ? 

Les défis actuels pour nous au consulat sont doubles. Le premier défi, c'est d'arriver à convaincre les Français qui arrivent au Canada de s'inscrire sur le registre des Français à l'étranger. Ça, c'est vraiment un grand défi. Il semblerait qu'ici, à Montréal, le taux d'inscription au registre est l'un des plus faibles au monde. C’est très surprenant. On essaye de comprendre pourquoi, on doit réussir à convaincre nos compatriotes de s'inscrire. C'est vraiment important.

Le second défi est en matière d'économie et de commerce. On a un écosystème extrêmement riche ici à Montréal. On a pour mission au consulat de l'accompagner. C'est un défi important de réussir à apporter de la cohérence et de servir au mieux toute cette grande diversité d'acteurs. Ainsi, d'une part, un défi plutôt strictement sur la Communauté française, et d’autre part un défi plutôt économique et commercial. 

 

« Montréal est capable d'intégrer tous types de personnes arrivées de n'importe où dans le monde, avec n'importe quelle culture, n'importe quel bagage. La politique d'intégration est vraiment forte. L'immigration est vue comme une richesse. » Marie Lapierre.


Comment caractériser la communauté française à Montréal ces dernières années ? Quelles sont les tendances émergentes des préoccupations des ressortissants Français que vous constatez ? 

Notre communauté est surtout très dynamique et vraiment très diverse. On a des milliers de Français qui viennent s'installer chaque année au Québec. C’est vraiment une communauté très, très riche. Il y a des étudiants, des détenteurs de permis vacances travail, des volontaires internationaux, des travailleurs qualifiés, des investisseurs… Au consulat, on a le plaisir d'enregistrer 2.000 naissances de bébés français par an. C'est un des aspects très agréables de notre travail.  Nous arrivons à célébrer à peu près 200 naturalisations de nouveaux ressortissants français chaque année. Ce sont de très beaux moments avec une communauté très dynamique et qui se renouvelle et qui s'étend.

Notre communauté est vraiment présente dans tous les secteurs d'activité au Québec, et y compris dans des secteurs très stratégiques. Dans la région de Montréal, par exemple, la France est le deuxième pays d'origine des investissements. On compte 345 entreprises françaises à Montréal qui représentent à peu près 17 % des filières étrangères à Montréal. Nous sommes derrière les États-Unis, ce qui est assez naturel, mais devant tous les autres pays Européens, cocorico ! 

Nous avons également un dispositif d'accompagnement vraiment solide du point de vue économique. Nous avons le service économique qui représente la Direction générale du Trésor française qui apporte un grand soutien macro économique à nos entreprises. On a aussi une agence de Business France qui accompagne les entreprises françaises, surtout les PME et les petites entreprises qui veulent venir investir ici au Québec, mais aussi les Québécois qui souhaitent aller investir en France. Nous avons également une Chambre de commerce et d'investissement du Canada ultra dynamique, qui est basée ici à Montréal, qui compte 300 membres et qui accompagne vraiment les entreprises qui souhaitent investir offrant des solutions d'hébergement pour les PME. On parle aujourd'hui du parcours exceptionnel de Décathlon au Québec. Il y a maintenant huit magasins dans un secteur qui était, jusqu'à présent, assez fermé en Amérique du Nord. C'est vraiment un succès de la grande distribution qui bénéficie aux Québécois qui peuvent se procurer du matériel de très bonne qualité pour un très bon prix. En plus de cela, à Montréal, il y a un tissu associatif très riche, avec beaucoup d'associations qui s'occupent des Français, comme Montréal Accueil, l'Union des Français…

Toute cette communauté, toute cette sphère française francophone, représente la plus grosse communauté française en dehors de l'Europe. Clairement, c'est une spécificité dans le monde, et en terme économique et commercial aussi. C'est vraiment très très particulier. Aucun pays européen ne peut bénéficier d'une telle relation avec une région d'Amérique du Nord. La France a vraiment une relation privilégiée.

Je pense que parmi les critères d'attractivité de Montréal, il y a sa diversité et son ouverture. Montréal est une ville dans laquelle personne ne peut se sentir rejeté. La ville est capable d'intégrer tous types de personnes arrivées de n'importe où dans le monde, avec n'importe quelle culture, n'importe quel bagage. La politique d'intégration est vraiment forte. L'immigration est vue comme une richesse.

 

« On compte 345 entreprises françaises à Montréal qui représentent à peu près 17 % des filières étrangères à Montréal. Nous sommes derrière les États-Unis, ce qui est assez naturel, mais devant tous les autres pays Européens, Cocorico! »  Marie Lapierre. 


Plus tôt dans l’année, des comportements d’intimidation, sexistes ou agressifs, de manière répétée, de la part du Consul général de France à Toronto, M. Tudor, ont été rapportés. Quel est votre avis et comment appréhenderiez-vous ces problématiques ici à Montréal ? 

Il est clair que le harcèlement n'a aucune place dans aucun pays. Au consulat ici au Québec, il n’y a aucune place pour le harcèlement. Géraldine, la consule général adjointe, et moi y sommes particulièrement sensibles et intolérantes. Nous avons toutes les deux des formations dans ce domaine. Nous sommes très sensibles à ces questions et travaillons à sensibiliser toute l'équipe sur cela. Par exemple, la question des gestion des handicaps, et notamment les handicaps invisibles, comment adapter les conditions de travail ?

Nous sommes toutes les deux membres de l'association Femmes et diplomatie qui travaille sur l'inclusion, l'égalité homme/femme au sein du ministère des Affaires étrangères. On a d'ailleurs beaucoup d'hommes qui sont membres de l'association parce que les questions d'inclusion des femmes sont des questions de société qui concernent bien sûr largement autant les hommes que les femmes. Nous avons beaucoup travaillé là-dessus, nous sommes extrêmement sensibles. Ce sont des messages qu'on fait passer à tous les agents qu'on rencontre en arrivant, et qu'on continuera à faire passer. 

 

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« A Montréal, toute la sphère française francophone représente la plus grosse communauté française en dehors de l'Europe.»  Marie Lapierre. 


En préparant l’interview, nous avons constaté que le Consulat insiste sur l’importance d'inscrire sur le registre des Français établis hors de France. Pourquoi est-ce important ? Y’a-t-il une baisse d’inscriptions constatée ? 

Je pense que peu de Français le savent, mais notre dispositif au consulat est basé sur le nombre de Français dans la circonscription. Ici, nous avons 65.000 Français qui sont inscrits dans la circonscription de Montréal. Donc notre dispositif est adapté à ce nombre, nous avons le nombre d'agents nécessaires pour 65.000 Français. Sauf qu’en réalité, il y a environ 200.000 Français à Montréal. On comprend assez vite pourquoi c'est long d'obtenir un rendez-vous pour un passeport par exemple, parce qu'on n'a pas le nombre d'agents nécessaires pour servir les Français. Donc plus les Français vont s'inscrire, plus on a une image réelle de notre communauté, et plus on adapte notre dispositif et donc mieux les Français sont servis. 

Mais la première utilité du registre est pour les questions de sécurité, c'est très sérieux. En cas de catastrophes naturelles au Québec, feux de forêt, inondations, c'est vraiment important qu'on soit en mesure de pouvoir assister les Français le plus rapidement possible. Bien entendu, les autorités canadiennes et québécoises sont extrêmement performantes. On ne va pas se substituer à leur travail, mais savoir où se trouve un Français et être en mesure de dire sa localisation. C'est très utile et cela nous permet aussi d'informer les familles qu'en cas d'accident, imaginez un accident massif de bus ou de train ou d'avion. C'est très important. 

Je peux donner un exemple très précis. En Turquie, lorsqu'il y a eu le tremblement de terre cette année, on a réussi à sauver une famille de Français car nous savions qu'il résidait à un endroit très précis et nous avons pu indiquer aux autorités turques qu'il y avait des gens dans cet endroit. 

On comprend bien que les Français ne se sentent pas en insécurité en arrivant au Québec, mais personne n'est à l'abri d'une catastrophe naturelle ou humaine. C'est important de s'inscrire. Une autre raison, plus administrative, est que l’inscription facilite toutes les démarches auprès du consulat. Il y a aussi des tarifs préférentiels pour les gens qui sont inscrits sur le registre. C'est nécessaire pour les jeunes qui doivent obtenir leur certificat de journée d'appel à la défense par exemple. Et un dernier point, le registre n'est pas un outil de contrôle ! Il n'est aucunement relié à l'administration fiscale ni aux autorités migratoires. Les données qu'on met dans le registre sont entièrement protégées, conformément au règlement général sur la protection des données. 


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