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EXPAT – Quand les Italiens émigrent

Écrit par lepetitjournal.com Madrid
Publié le 30 juin 2013, mis à jour le 1 juillet 2013

"Io torno se?" (je reviens si?), c'est le nom d'un blog, l'idée originale d'un journaliste italien qui donne la parole à ses concitoyens. Le principe est simple : ils sont tous partis travailler à l'étranger. Ils témoignent de leurs situations et expliquent pourquoi ils sont partis mais surtout à quelles conditions ils pourraient rentrer au pays.

Io torno se?

C'est l'histoire d'un pays, troisième puissance européenne qui a du mal à garder ses jeunes cerveaux au bercail. Alors que l'Italie s'enfonce un peu plus chaque jour dans la récession, les jeunes diplômés sont de plus en plus nombreux à faire le choix de quitter leur pays, leur famille, leurs racines pour tenter leur chance ailleurs. Antonio Siragusa, jeune journaliste de 28 ans a fait de cette situation une réalité en donnant la parole à ces Italiens qui aimeraient rentrer chez eux mais qui n'ont aucune perspective d'avenir. "C'est en voyant mes cousins, mes copains d'école partir que j'ai décidé de créer le blog Iotornose.it" nous explique Antonio Siragusa.

Parmi les témoignages recueillis par ce journaliste, originaire de la région de Naples, on trouve par exemple celui d'Alessandro. Ce jeune entrepreneur a créé son entreprise à Paris avec un ami. Il explique que la bureaucratie italienne est écrasante et qu'il ne regrette pas d'être parti. "Pour ouvrir une start-up en France, on a payé 80 euros à la Chambre de commerce. (?) En Italie, on aurait du débourser 700 euros minimum" dit-il. Il dresse un portrait au vitriol de l'Italie et regrette le corporatisme de son pays d'origine.

Autre témoignage, celui de Natascia. Elle a 28 ans et prépare un doctorat en droit à l'université de Mainz, en Allemagne. "Je rentre en Italie même si je gagne la moitié, à condition de faire un travail digne qui me fait vivre moi et ma famille" déclare-t-elle. Elle n'a pas envie de choisir entre sa carrière et le fait de former une famille. Pour elle, il est impossible de penser faire un enfant avant 40 ans si elle rentre en Italie. Alors, elle envisage sérieusement de retourner en Allemagne une fois sa thèse soutenue à Lecce, dans les Pouilles.

Autant de situations qu'Antonio Siragusa compile dans son blog afin de montrer une réalité qui risque de mener l'Italie à sa perte si elle continue de laisser partir ses cerveaux.

Enrico Letta, le sauveur ?

La fuite des cerveaux n'est pas un phénomène nouveau en Italie. Enfoncé dans la récession depuis plus de deux ans, le pays

peine à garder ses jeunes diplômés. Le taux de chômage des jeunes n'a cessé de grimper pour atteindre plus de 40 %. "Quelles perspectives d'avenir un jeune peut-il espérer ?" se demande Antonio Siragusa.

Pourtant, le gouvernement en place depuis trois mois a fait de l'emploi des jeunes une priorité. Enrico Letta s'est même excusé après d'eux, au nom de toute la classe politique dans une lettre publiée par La Stampa, le 2 juin dernier. Il est même allé porter un projet européen concernant le chômage des jeunes à Bruxelles, lors du dernier Conseil européen. Quelque 4 milliards d'euros ont été débloqués rien que pour l'Italie. Et pourtant, rien n'arrête ce phénomène d'émigration. "Il est sans doute un peu tôt" note le journaliste italien.

Quels espoirs peut-on donner à l'un des pays les plus diplômés d'Europe ? Tous parlent de gérontocratie où les jeunes n'ont pas leur place s'ils ne sont pas pistonnés. Le problème n'est sans doute pas la formation puisque les Italiens ayant obtenu une licence à l'université sont plus nombreux que les Français. Mais d'où vient le problème alors ? "De la corruption et du corporatisme" regrette Antonio. Et lorsqu'il parle de corruption, il ne pense même pas à la grande mafia mais à un système qui touche toutes les strates de la société. Il dénonce, par exemple les concours qu'il dit souvent pipés. "Les jeux sont parfois déjà faits par avance". Mais de quoi parle-t-il donc ? A l'écouter ou à lire les témoignages sur son blog, on comprend que dans bon nombre de secteurs, l'attribution de postes par le biais de concours relève plus du copinage et de l'intérêt personnel que d'une réelle mise à égalité de tous les prétendants. Triste constat devenu une réalité. L'appel du Premier ministre à reconstruire l'Italie avec l'aide de tous les jeunes suffira-t-il à inverser la tendance ?

Aurélien Bureau (Lepetitjournal.com de Milan) ? lundi 1er juillet 2013

photos:
- Rome, piazza di Spagna (A.B pour lepetitjournal.com)
- Enrico Letta (capture d'écran)

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Publié le 30 juin 2013, mis à jour le 1 juillet 2013