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Quelles sont les erreurs à éviter lors d'un entretien d'embauche en Espagne?

Que ce soit en France ou en Espagne, il existe un certain nombre de comportements qui font fuir les recruteurs. Décryptage avec une experte en ressources d'humaines qui nous rappelle aussi les erreurs que commettent les Français sur le marché du travail espagnol.

Un entretien d'embauche en visio en EspagneUn entretien d'embauche en visio en Espagne
OC
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 15 février 2024, mis à jour le 1 mars 2024

Un entretien d'embauche, que ce soit par téléphone, en visioconférence ou en personne, est un moment très important, quelques minutes qui peuvent faire la différence pour l'obtention d'un rendez-vous ou du poste convoité. Si les recruteurs sont conscients que les candidats peuvent avoir le trac, il existe un certain nombre de situations susceptibles d'anéantir leurs chances d'obtenir le poste. Françoise Martinage, Directrice générale du Groupe CRIT, qui figure dans le Top 20 des leaders mondiaux de services en RH, les passe en revue avec lepetitjournal.

 

Françoise Martinage
Françoise Martinage, Directrice Générale du Groupe CRIT

De plus en plus d'entretiens en visio

Les temps changent, et encore plus depuis la pandémie. Les entrevues en visio sont de plus en plus utilisées par les départements de ressources humaines des entreprises, au moins pour effectuer une première sélection s'il y a beaucoup de postulants. Or, même si les candidats sont chez eux et subissent un peu moins de pression, l'étiquette et les bonnes manières restent importantes.

Un entretien d’embauche est une opération de séduction. Ce qu’il faut, c’est capter l’attention très rapidement

Comme pour les entretiens "traditionnels", le fait d'arriver en retard ou, dans ce cas, de se connecter en retard, dérange les intervieweurs. "Avant de passer un entretien en visio– recommande François Martinage-, il faut d’abord bien s'assurer que tout fonctionne parfaitement, parce qu'on rencontre souvent des candidats qui ont plein de problèmes pour se connecter. Les écouteurs qui ne marchent pas, la caméra qui ne fonctionne pas. Ce n’est pas rédhibitoire, mais ce n’est pas l’idéal." En outre, le fait que la caméra du candidat reste éteinte tout au long de la conversation constitue un mauvais signe pour les recruteurs.

Attention à la caméra

Mais attention, la caméra permet aussi de visionner des choses surprenantes, comme le fait que le candidat parle à quelqu'un hors caméra pendant l'entretien. "Il faut aussi faire attention à l'endroit où l'on passe l’entretien -conseille Françoise Martinage-. Ça nous arrive que ce soit par exemple dans une chambre d’enfants. On voit parfois des trucs rigolos, ou des membres de la famille se faufilant par derrière. Il y en a aussi qui passent l’entretien depuis un café ou dans la voiture. Si c’est un commercial, ça peut être normal mais c’est quand même mieux d’être posé, d’avoir le temps de converser".

Si un candidat passe plusieurs entretiens et qu'il n'obtient rien, c’est qu'il y a un problème

Autre aspect fondamental, l'apparence. Outre le fait qu'il faut être soigné et s'habiller correctement - une recommandation basique, mais qui apparemment n'est pas toujours suivie- il convient de faire attention à la lumière. "Il faut être bien éclairé -rappelle Françoise Martinage-. Mais, attention au sens de la lumière, car si elle vient par derrière, on ne voit qu’une ombre noire et c'est du plus mauvais effet".

Faire attention au téléphone

La majorité des recruteurs ont déjà eu recours à un appel téléphonique pour interviewer un candidat. Cela leur permet de rationaliser le processus de recrutement et économiser du temps et des ressources. Les candidats peuvent expliquer ainsi leur CV dans un cadre informel avant que leur expérience ne soit examinée en personne. Bien que le processus puisse sembler simple, les candidats peuvent donner une mauvaise impression sur des détails. Là encore, l'étiquette est importante. Interrompre le recruteur avant qu'il n'ait fini de poser une question ou pendant qu'il parle, certains bruits de fond comme le fait de manger ou de boire pendant l'appel, les bâillements ou le fait de ne pas répondre du premier coup peuvent également avoir un impact négatif sur les aspirations d'un candidat.

Quand on passe une entrevue, on donne beaucoup d’indices, et pas seulement dans ce que l'on dit

S'enregistrer pour voir ses erreurs

Tout le monde n’a pas de facilités pour passer un entretien d’embauche. "On le voit bien -souligne Françoise Martinage-, pour certains, c’est très facile alors que pour d'autres, on sent que c'est un calvaire. Il est clair que si un candidat passe plusieurs entretiens et qu'il n'obtient rien, c’est qu'il y a un problème. Le mieux à faire dans ce cas-là, c’est qu’il s’enregistre. C'est très désagréable, mais c'est le meilleur moyen de voir toutes les erreurs". On peut ainsi détecter si l'on est trop lent, rapide, confus, si l'on répète tout le temps les mêmes mots ou expressions, etc.

 

"Quand on passe une entrevue -ajoute François Martinage- on donne beaucoup d’indices, et pas seulement dans ce que l'on dit: l’énergie qu’on emploie, la façon de dire les choses, de dire bonjour, de raconter son histoire et ça, ça dit beaucoup de la personne, parce qu’il y a des gens qui parlent de façon confuse, qui passent constamment du coq à l’âne ou au contraire qui sont très stratèges, ça se voit tout de suite".

Entretien d'embauche: Opération séduction

La responsable de CRIT en Espagne le résume parfaitement: "Un entretien d’embauche est une opération de séduction. Ce qu’il faut, c’est capter l’attention très rapidement, avoir une 'storytelling', quelque chose d’intéressant à raconter. Il faut susciter l’envie de vous recruter. Il ne faut pas non plus paraître fatigué, dépressif, démotivé". Mais attention, être motivé ne veut pas dire être désespéré et prêt à tout, auquel cas l’entreprise pourrait en profiter pour baisser le salaire par exemple.

Les Français ont la réputation d’être arrogants et il est donc important de ne pas arriver en terrain conquis

Plus généralement et indépendamment du format de l'entretien, certaines attitudes sont à proscrire: "Il faut absolument éviter d’être critique envers les entreprises dans lesquelles on a travaillé ou de dire qu’on va attaquer la boîte qui nous a licencié. On a l’impression que le candidat n’a pas fait le deuil de cette relation. Alors ça ne veut pas dire qu’il faille raconter que tout était merveilleux mais on ne doit pas s’étendre sur le sujet".

Vive les échecs

Avoir connu des échecs n'est d'ailleurs pas mauvais. "Il est rare que tout soit positif -explique Françoise Martinage-. Il y a forcément eu un échec, d’autant que c'est d'eux qu’on apprend le plus. Alors, dire que tout a toujours été top, c’est rarement vrai et il y a même certains recruteurs qui estiment qu'un candidat sans erreur n'est pas intéressant parce que justement les erreurs permettent d’apprendre. Par exemple, cela peut arriver que le candidat soit rentré dans un secteur et que finalement il se soit rendu compte que ça ne lui correspondait pas et il se réoriente ; il n'y a rien de mal à le raconter. Il vaut mieux dire 'j’ai eu ces problèmes, mais du coup, j’en ai tiré ces leçons.'"

Ne jamais mentir

À ce propos, la responsable de CRIT rappelle qu'il ne faut surtout pas mentir. "On peut enjoliver son parcours professionnel, le présenter de la façon la plus positive possible, mais il faut bien penser que les entreprises vont vérifier les références et que le monde est petit. Chez nous, on vérifie systématiquement les références, alors il faut aussi faire attention à celles que l’on donne si l'on veut éviter que l’entreprise dans laquelle on travaille encore soit mise au courant!".

Certains recruteurs estiment qu'un candidat sans erreur n'est pas intéressant parce que justement les erreurs permettent d’apprendre

Poser des questions

Autre point qui énerve les recruteurs est le fait que le candidat n'ait effectué aucune recherche au sujet de l'entreprise et ne pose aucune question. "C’est bien d’être au courant de l’entreprise, de sa stratégie, d’avoir lu les dernières infos à son sujet. En plus, c’est important aussi pour le candidat de savoir dans quel genre de société il veut travailler. Si c’est une entreprise avec un environnement ultra compétitif, peut-être que cela ne lui convient pas".

 

Outre la société, un autre point fondamental est de bien connaître le type de profil de l'emploi. "Si l’entreprise recherche un commercial, qui est logiquement orienté 'objectifs', le candidat doit donc raconter au cours de l’entretien ce qu’il sait faire à ce sujet: Si en revanche, le candidat va plutôt travailler dans les 'process', il faut qu’il montre qu’il est très structuré". En définitive, il faut bien analyser les prérequis du poste et expliquer son parcours pour que ça "match" avec le poste. "Si c’est un emploi où il faut beaucoup travailler en équipe, il convient de raconter ses expériences antérieures où l'on a bien travaillé avec les autres. Par contre, si l'on préfère travailler seul, il ne faut pas aller dans un poste comme ça, d'où la nécessité de bien se renseigner tant sur l'entreprise que sur le type de poste".

Les erreurs des Français qui cherchent un emploi en Espagne

Et qu'en est-il des Français qui recherchent un emploi en Espagne? "Les Français ont la réputation d’être chauvins, arrogants – prévient Françoise Martinage- et il est donc important de casser cette image et de faire bien attention de ne pas arriver en terrain conquis".

 

Ne pas maitriser la langue de Cervantés est un autre inconvénient. "Nous recevons parfois des Français qui cherchent du travail sans parler un mot d’espagnol. Certes, il y a beaucoup d’entreprises françaises en Espagne. Mais une bonne maîtrise de la langue est important, et même si l'on ne le parle pas très bien, il faut au moins montrer qu’on a envie d’apprendre, et souligner que c’est un plus de connaître plusieurs cultures".

 

Un des cas les plus typiques est celui de l'expatrié qui suit son conjoint. "Dans leur cas, cela n’a pas été un choix professionnel -explique Martinage- mais plutôt un choix de famille, et il faut qu’ils apprennent à s’adapter. Il y en a qui ne sont pas enchantés d’être là, et qui ont une attitude hyper critique envers le pays d’accueil. Ces Français ont du mal à trouver un emploi, car pour travailler ici, il faut quand même aimer l'Espagne et les Españols".

 

En outre, il ne faut pas confondre les marchés du travail français et espagnol. "Il y a des Français qui ont des degrés d’exigence trop élevés. Les marchés de l’emploi en France et en Espagne ne sont pas identiques. Certains Français critiquent l'Espagne, parce que les salaires sont plus bas mais les niveaux de vie sont différents. La clé là encore est d'apprendre à s'adapter".