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Le chiffre de la semaine – Plus d’un million de briques.

Écrit par Lepetitjournal Johannesbourg
Publié le 14 avril 2015, mis à jour le 6 janvier 2018

(Crédit: LB)

Les sculptures de Lego de l'américain Nathan Sawaya s'exposent à Johannesburg. Réjouissante pour les petits et les grands, The Art of the Brick ne laisse personne de? plastique. D'une habilité remarquable, l'?uvre met en perspective la transformation du jouet, de l'artiste, et celle de notre monde.

Chez Nathan Sawaya, l'enfant a triomphé. Il a porté à la gloire le fantasme du petit garçon: créer un monde entier, ludique et coloré, à partir de ses minuscules jouets. Après Le Cap, l'exposition itinérante acclamée dans le monde entier s'est installée à Rosebank. L'?uvre est si prolifique qu'on peine à croire qu'il s'agit du travail d'un seul homme. Les 75 sculptures et tableaux impressionnent par leur taille et leur réalisme. Parmi les infinies combinaisons possibles de ces blocs à angles droits, chaque ?uvre, se révèle à nos yeux comme une nouvelle surprise. Tel l'enfant qui se demande quel adulte il deviendra, quels sont ses talents, de quoi sera faite sa vie de grand, l'auteur New-Yorkais tâtonne et explore une multitude d'expériences à travers ses créations.

Aujourd'hui âgé de 41 ans, Sawaya nous raconte comment l'adulescent qu'il était, a trainé à grandir. Longtemps il s'est dit retenu par le confort d'une carrière d'avocat. S'ennuyant, mais faisant ce qu'on attendait de lui. Il réplique des ?uvres classiques (le Panthéon, la Venus de Milo, mais aussi une série de tableaux archi-connus dont La Joconde), comme pour tester ses jeux de construction à la mesure de l'Art avec un grand A. Comment l'homme quittera t'il son costume gris et son « masque » - du titre d'une des sculptures, celle d'un homme arrachant son visage de sa tête ? La réponse apparaît au fil des représentations de figures humaines, dans la dernière partie de l'exposition, la plus riche en émotions. Quelle sera l'issue du combat entre l'avocat et l'artiste ? Yellow, son ?uvre la plus connue, exprime la transcendance qui s'opère à l'issue de ce conflit interne.

Yellow ? Photo officielle. En dépit de la conception mécaniste du corps, il reste une part de l'homme qui ne peut se réduire à la somme de ses parties (ou de ses petites briques). Les émotions débordent et refusent de se laisser emprisonner. Yellow figure l'artiste, à la fois en souffrance et en extase, qui ouvre littéralement son c?ur et ses tripes, et prend le risque d'exposer la part la plus intime de lui-même. Et s'offre à son public tel le Christ en croix.

Yellow a inspiré plusieurs musiciens : immortalisée par un clip de Lady Gaga, utilisée comme logo par un DJ et illustrant une pochette d'album par un autre groupe. Une réponse à Pink Floyd, Another Brick in the Wall ?

«L'art n'est pas une option.»

En filigrane un sentiment de malaise plane au-dessus du visiteur. Quel est le rôle du fabricant danois dans cette affaire? Autrefois, le mécène aurait accolé son logo sur l'affiche pour signaler un sponsoring. Aujourd'hui, le règne des grandes entreprises est à son apogée. La marque a pris la place au centre de l'?uvre. Au centre de notre vie. Les multinationales modèlent notre sphère économique, notre société, et marquent leur empreinte sur la culture, l'art, et au final sur nous-mêmes. Serions-nous devenus les jouets de cette immense campagne publicitaire?

Omniprésent, le plastique domine la planète. Il nous est plus familier que la glaise des sculpteurs traditionnels. Envahis par une surenchère de technologie, nous vivons dans un monde binaire, compartimenté. Les briques Lego « pixellisent » notre vision du monde, comme si nous le percevions à travers un ordinateur.

Face à ces transformations de notre monde, l'artiste nous invite à jouer un rôle actif. L'?il du spectateur recrée spontanément la continuité, là où il y a une ligne brisée. Complice, il reconnaît une ?uvre du patrimoine culturel. Aussi, il joue, sans être dupe de la supercherie, à converser avec un « Homme bleu assis » (photo) en s'installant dans le siège placé à ses côtés.
« L'art peut nous permettre de comprendre le monde. » dit-il. Nathan Sawaya dédramatise les menaces de notre époque et nous invite à regarder notre environnement avec un ?il d'enfant, inlassablement curieux et inventif.

 

Lisa Binet (www.lepetitjournal.com/lecap.htmlmercredi 15 avril 2015

Jusqu'au 2 aout 2015 à The Zone, Rosebank, Johannesburg.
Entrée R140 et R95 pour les moins de 18 ans. Gratuit pour les moins de 2 ans.

L'exposition sera à Paris au parc des expositions de la porte de Versailles à partir du 14 Mai.

http://www.brickartist.com

 

lepetitjournal.com johannesbourg
Publié le 14 avril 2015, mis à jour le 6 janvier 2018

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