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Une ancienne décharge reconvertie en ferme urbaine à Chiang Mai

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Catherine Vanesse - Pour nourrir les populations pauvres de Chiang Mai, une ferme urbaine a vu le jour sur une ancienne décharge
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 18 janvier 2021, mis à jour le 18 janvier 2021

A Chiang Mai, une ancienne décharge publique a été reconvertie en ferme urbaine offrant aux habitants pauvres des abords du canal Mae Kha une alternative pour se nourrir. 

Le canal Mae Kha traverse le centre historique de Chiang Mai. Même s’il est très pollué, il a également une fonction de poumon vert dans une ville en plein développement grâce à ses grands arbres bordant le cours d’eau. Sur ses rives, plus de 2.500 familles pauvres se sont installées au cours des années de manières un peu anarchiques dans des maisons souvent rudimentaires. 

En mars 2020, les mesures prises par les autorités thaïlandaises pour freiner la propagation du coronavirus ont mis au chômage nombre des habitants qui vivent près du canal. La plupart travaillant dans l’industrie du tourisme, - nettoyage de chambre d’hôtel ou fabrication d’artisanats - , se sont vus du jour au lendemain sans revenus. 

À travers le bureau d’architecture Jaibaan Studio, l’architecte Supawut Boonmahathanakorn travaille depuis cinq ans auprès de la communauté de Mae Kha pour trouver des solutions en termes de logements, d’aménagement d’espaces verts et de durabilité.

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Tous les vendredis, l'architecte Supawut Boonmahathanakorn organise des ateliers avec les habitants du quartier, des bénévoles, des étudiants de l'université, etc. (Catherine Vanesse)

“Pour les gens à faibles revenus, 70% de leur budget est consacré à l’alimentation. Avec les mesures pour lutter contre le Covid-19, beaucoup des habitants ont perdu leur emploi. Au mois de mars, nous sommes allés rendre visite à ces communautés qui vivent le long du canal. Certains d’entre eux avaient commencé à cultiver des fruits et légumes. Le problème, c’est que le canal est trop pollué et le sol aussi”, explique Supawut. 

L’idée émerge alors d’utiliser des terrains délaissés par la municipalité pour les reconvertir en fermes urbaines. “Le terrain où nous sommes actuellement était une décharge depuis plus de 20 ans, le terrain était totalement à l’abandon!”, ajoute l’architecte de 39 ans. 

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Jaibaan Studio a donc travaillé avec les communautés pour rédiger une proposition pour avoir le soutien de la municipalité et l’autorisation d’exploiter le terrain de 4800 mètres carrés. Le maire de Chiang Mai était réticent au début, mais ils ont pu trouver un appui du côté du gouverneur pour obtenir l’autorisation d’utiliser le terrain. Par contre, le plan financier, ils ont dû se tourner vers les réseaux sociaux et lancer un appel aux dons d’argent, mais aussi de plantes, de graines et d' outils de jardinage. 

Avant de planter les premières graines, il a fallu déblayer près de 5.700 tonnes de déchets, niveler le site et ajouter un mètre d’épaisseur de terre arable. Sur les conseils d’experts en jardinage biologique, ils ont ajouté dans les plates-bandes un mélange de compost et de Biochar (charbon biologique fabriqué en brûlant des épis de maïs ou de la paille de riz). 

“Nous contrôlons régulièrement le sol pour nous assurer qu’il n’est pas trop pollué et que les légumes sont sains pour la consommation”, précise Supawut. 

une femme confectionne des pompoms
De nombreux habitants du quartier de Mae Kha travaillent dans l'industrie du tourisme ou de l'artisanat comme cette femme qui confectionne des pompoms qui seront vendus au marché de Warorot. (Catherine Vanesse)

Lors de la première phase des mesures sanitaires restrictives jusqu’au mois de mai, six familles jardinaient tous les jours dans la ferme. Avec la reprise de l’activité économique et un redémarrage du tourisme, trois familles ont pu recommencer à travailler. Les nouvelles restrictions risquent de les voir revenir à la ferme. “Il y a également deux autres personnes qui vivent sur place, elles sont sans-abri, elles prennent vraiment soin de la ferme au quotidien. L’idée est que les gens qui travaillent dans la ferme puissent récolter les légumes pour eux, mais aussi vendre les surplus pour qu’à terme cela puisse devenir une source de revenus rentables pour ces familles. Les autres résidents de la communauté peuvent venir se servir en fruits et légumes quand ils veulent”, ajoute l’homme originaire de Chiang Mai. 

Six mois après les premières récoltes, Supawut se dit satisfait de l’expérience, même si des adaptations sont nécessaires : “nous réalisons que certains légumes ne sont pas populaires auprès des gens de la ville et donc c’est plus difficile de les vendre. Il y a beaucoup de communautés, de personnes originaires de différentes tribus, chacun avec ses spécialités. Nous devons plus étudier ce dont les gens ont besoin et ce qui se vend bien sur les marchés”. 

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La ferme urbaine de Mae Kha occupe un terrain de 4.800 mètres carré, un projet qui pourrait inspirer d'autres initiatives similaires (Catherine Vanesse)

Pour ajouter à l’esprit communautaire, des étudiants en agriculture de l’université de Chiang Mai viennent régulièrement apporter leur aide pour partager leurs connaissances lors d’ateliers qui ont lieu tous les vendredis.

La ferme urbaine de Mae Kha est une expérience pilote encore en phase de test avec pour objectif de séduire les autorités locales de l’intérêt de ce genre de projet. Le terrain appartenant à la municipalité, celle-ci pourrait à tout moment décider d’en reprendre possession. 

“C’est une expérience, une manière de prouver ce qui peut être fait dans ce quartier. Nous souhaitons convaincre les autorités municipales de prendre part de manière plus active et de continuer à développer et créer d’autres exploitations agricoles en ville”, conclut Supawut. 

Si les autorités doivent encore être séduites, la ferme urbaine de Mae Kha a été récompensée le 3 décembre 2020 par le Chiang Mai Design Award en remportant le prix “Nouvelle initiative en design”. 

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