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Johanna Lévy, lauréate du Trophée Alumni des lycées français du monde 2024

Expatriée en Thaïlande, Johanna Lévy est lauréate du Trophée Alumni des lycées français du monde 2024. Investie depuis 2015 dans l’aide aux réfugiés, elle a co-fondé en 2022 la structure Hope-Bangkok.

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Impliquée dans l’aide aux réfugiés depuis 2015, Johanna Lévy a co-fondé il y a deux ans la structure Hope-Bangkok. Photo courtoisie
Écrit par Régis LEVY
Publié le 19 mars 2024, mis à jour le 29 mars 2024

La lauréate 2024 du Trophée Alumni des lycées français du monde 2024, parrainé par l'AEFE et lepetitjournal.com, réside à Bangkok. Impliquée depuis 2015 dans le soutien des réfugiés en Thaïlande, Johanna Lévy a créé en 2022, avec une autre Française, Servane Ternynck Pierre, et une équipe de volontaires de sept nationalités différentes, la structure Hope-Bangkok. Une initiative qui vise à soutenir financièrement les réfugiés, à favoriser leur remise en liberté et à former les femmes à la confection de sacs et d'accessoires.

Née à Paris, Johanna Lévy déménage à l’âge de 10 ans à Tokyo, où son père est affecté. Elle y a passé ses années de collège (de la 6e à la 3e) au lycée français de Tokyo. Cette période a marqué son parcours universitaire et professionnel. Après un retour à Paris, elle a poursuivi ses études et obtenu une Maîtrise de Japonais ainsi qu'un Master en Commerce et Échanges avec l’Asie.

Dans le cadre de son stage de fin d’études, elle part à l’âge de 24 ans effectuer un VIA de deux ans (Volontariat International en Administration) à l’ambassade de France à Tokyo, qui la détache au JETRO (centre japonais du commerce extérieur) pour accomplir une mission de consultante pour des entreprises françaises souhaitant s’installer au Japon. Après quatre années supplémentaires dans le secteur privé, elle rentre en France avec son mari et leur fils de deux ans.

 

 

 

Nouveau départ en Asie avec toute la famille

En 2015, après cinq ans en France, le désir de l'Asie se faisant sentir, elle entreprend un nouveau départ avec son mari, leurs deux fils et ses parents en Thaïlande.

Quelques mois après son arrivée, sa mère lui propose de rendre visite à des réfugiés dans un centre de détention organisé par le pôle caritatif de Bangkok Accueil. C'est là qu'elle découvre l’IDC (Immigration Detention Center) de Suan Phlu, où sont détenus des réfugiés d'origines diverses fuyant les guerres, les persécutions et les violences : Pakistanais, des Somaliens, des Éthiopiens, des Syriens, des Afghans, etc.

La plupart sont arrivés avec un visa de tourisme et se retrouvent contraints de dépasser leur visa. La Thaïlande ne reconnaissant pas le statut de réfugié, ils sont alors exposés au risque d'être détenus pour dépassement de visa.

Un "électrochoc"

"Cette première visite d’une famille pakistanaise a été un électrochoc", raconte Johanna Lévy. "Je ne savais pas qu'un tel endroit existait et je suis sortie avec un sentiment d'injustice pour tous ces gens. J'ai donc décidé d'y retourner toutes les semaines avec les autres bénévoles. Tous ces réfugiés sont coincés. Ils ne peuvent pas rentrer chez eux et attendent avec espoir qu'un pays tiers veuille bien les accepter (Canada, États-Unis, Australie)".

 

 

Rapidement, Johanna a rendu visite à de nombreux ressortissants somaliens. Étant donné que le centre de Suan Plu était saturé, de nombreuses Somaliennes ont été transférées dans un autre centre situé près de la frontière avec le Cambodge.

Une bonne nouvelle est survenue lorsque les autorités de l'Immigration ont commencé à autoriser la libération sous caution des personnes vulnérables, ce à quoi elle a participé à plusieurs reprises avec d'autres volontaires.

Soutenir les demandeurs d’asile coincés en Thaïlande, aider à leur libération

Johanna a été mise en relation avec une avocate thaïlandaise pour favoriser la libération d'une femme somalienne détenue depuis cinq ans et de trois autres hommes. Par miracle, leurs dossiers ont été acceptés moyennant une caution de 50.000 bahts. À leur sortie, les réfugiés ont bien reçu une autorisation de rester sur le territoire mais ils ne pouvaient pas y travailler, etc.

Cette situation, même en dehors du centre de détention, rend les réfugiés très vulnérables, leur seul moyen de subsistance étant de bénéficier de l'aide d'organisations ou de violer la loi en travaillant au noir, ce qui comporte des risques puisqu'ils peuvent être réincarcérés en cas de contrôle.

Après ces premières libérations, le téléphone de Johanna n'a plus cessé de sonner. Elle s’est retrouvée entraînée dans un engrenage sans fin, mais elle restait néanmoins déterminée. Les demandeurs d'asile lui envoyaient des appels à l'aide déchirants et elle continuait, avec d'autres bénévoles, à lever des fonds pour en libérer toujours plus.

Puis est arrivée la pandémie de COVID-19...

Créer une marque de sacs et accessoires pour lever des fonds

Les centres de détention ont été immédiatement fermés au public pour une période qui allait durer trois ans. Les réfugiés étaient confinés jusqu'à cent personnes par chambre, sans aucun droit de visite ni donation de nourriture. Les centres n'ont rouvert qu'en novembre 2023.

"C'est durant la première année de visites aux centres que j'ai rencontré Servane Ternynck Pierre et Isabel Centelles Roca, les co-fondatrices de Hope Bangkok", explique Johanna.

"En avril 2022, avec l’aide d’une personne thaïlandaise, nous avons déposé les statuts de la société et nous avons décidé de créer une marque de sacs et accessoires car nous avons parmi nos bénévoles des femmes très créatives. Parmi nos premières préoccupations figurait bien sûr de lever des fonds. Ces créations ont suscité un vif intérêt auprès de la communauté française lors de notre premier événement organisé par Bangkok Accueil".

Formations à la couture et à la confection de bijoux

"Depuis sa création, Hope Bangkok a participé à une quarantaine de foires, marchés et événements", poursuit-elle. "Nous sommes invitées à vendre dans les ambassades, lors d’événements en relation avec les réfugiés. Nous avons également mis en place des formations de couture et de confection de bijoux pour les femmes réfugiées, nous leur offrons des machines à coudre et nous avons constaté l'impact considérable que cela peut avoir sur leur vie, ce sentiment de créer, d'être utile et de faire partie d'une communauté".

Hope-Bangkok est une équipe de femmes bénévoles venant d'horizons différents : France, Suisse, Irak, Japon, Canada, Espagne, Inde. "Elles apportent leurs compétences et leurs expériences pour créer des designs uniques et distinctifs, dont 100% du fruit de la vente est destiné aux réfugiés", souligne Johanna. "Toutes souhaitent contribuer à améliorer la situation des réfugiés en Thaïlande et leur apporter une lueur d'espoir. Elles constituent l'ossature de l'organisation, leur dévouement est inépuisable et leur passion déborde de toute rationalité !"

"La cause des réfugiés n'est pas toujours mise en lumière"

La co-fondatrice de l’organisation Hope-Bangkok est donc aujourd’hui récompensée par le jury des Trophées des Français de l'étranger qui lui décerne le Trophée Alumni des lycées français du monde 2024.

Lorsque nous lui avons demandé quelle avait été sa réaction à l'annonce du résultat, Johanna Lévy a avoué avoir été surprise. "La cause des réfugiés n'est pas toujours mise en lumière et je ne pensais vraiment pas gagner", a-t-elle déclaré.

Je suis heureuse que l'on célèbre la résilience, le courage et la patience de toutes ces personnes incroyables

"Je suis très reconnaissante envers lepetitjournal.com et l’AEFE et fière du travail effectué de manière volontaire avec les bénévoles de l'équipe ces dernières années. Je suis heureuse que l'on célèbre la résilience, le courage et la patience de toutes ces personnes incroyables que j'ai eu l'opportunité de rencontrer".

Créer un centre communautaire

Pour ce qui est des projets d’avenir pour développer et pérenniser Hope Bangkok, Johanna Lévy et ses partenaires travaillent actuellement à obtenir la reconnaissance de l’organisation en tant qu’entreprise sociale.

"Mais ce n'est pas si simple en Thaïlande", indique Johanna. En effet, en l'état actuel des choses, avec son statut d'entreprise commerciale, Hope Bangkok ne peut pas recevoir de dons de grands organismes. Pour l’heure, tous les fonds proviennent de particuliers.

"Nous voudrions créer un centre communautaire comprenant une boutique où les gens pourraient acheter nos produits, un atelier où les femmes pourraient apprendre à coudre. Cet endroit leur donnerait aussi une possibilité de se retrouver pour reconstruire un tissu social. Nous aimerions pouvoir organiser des cours d'anglais, de yoga et d'autres activités pour les enfants. Un lieu où nous pourrions recevoir nos clients et où les femmes réfugiées pourraient se sentir en sécurité et écoutées et acquérir de nouvelles compétences pour leur futur", explique Johanna Lévy.

La lauréate du Trophée Alumni a également bon espoir de voir des progrès de la part des autorités. "Le gouvernement thaïlandais procède en ce moment à des entretiens avec les réfugiés et il n'est pas impossible qu'à l'avenir, ils soient autorisés à travailler sur le territoire. Un nouveau document sous forme de passeport a été édité en 2024 et remis à des libérés sous caution. Nous espérons donc un avenir plus radieux pour les réfugiés en Thaïlande".

Contacter Johanna Lévy
Tél: +66 (0)9 5709 1372
Email: info.hopebangkok@gmail.com
Facebook: hope-bangkok
Instagram: hope_bangkok

Publié le 19 mars 2024, mis à jour le 29 mars 2024

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