

Nous avons pu rencontrer l'Ambassadeur de France en Nouvelle-Zélande Monsieur Francis Etienne le vendredi 23 novembre lors de sa visite à l'école de Birkdale North Primary. L'Ambassadeur a surtout tenu à féliciter le travail de l'association Frenz et a insisté sur le besoin de communication avec les autorités locales et les représentants régionaux.
Lepetitjournal.com/Auckland - Monsieur l'Ambassadeur, quelles sont les raisons de votre visite à Birkdale North Primary aujourd'hui?
L'Ambassadeur Francis Etienne - Elles sont doubles. En tout cas, il y a deux raisons aujourd'hui. A l'école cet après-midi, c'est parce que je veux saluer le travail accompli. Je veux montrer l'intérêt que l'on y attache. Nous l'avons déjà manifesté je dirais en coulisse à travers des soutiens financiers que nous avons pu ménager; ou le relais que l'on peut avoir avec la partie administrative. Mais c'est d'abord une initiative locale avec quelques personnalités fortes qui se sont engagées depuis des années. Ce sont ces personnalités là qu'il faut venir saluer. C'est à la fois une venue par besoin de reconnaissance, témoignage de considération, et puis voir tout simplement comment les choses ont évolué. Ici, à l'Etoile du nord, quand on prend les effectifs du début de 2012 et la fin de l'année, ils ont été triplés, un succès extraordinaire. C'est vrai que, en se sentant assez spontanément solidaire du reste des Français qui vivent à l'étranger, on se dit qu'aujourd'hui, il y a des exemples à reproduire ailleurs. Par conséquent, bien comprendre comment tout cela a pu se faire à Auckland, c'est permettre de diffuser ce savoir-faire dans d'autres pays où les mêmes besoins ne vont pas forcément trouver d'aussi bonnes solutions qu'ici.
Vous n'excluez donc pas de voyager dans la région pour promouvoir ce modèle-là ?
Nous venons justement d'avoir une réunion régionale en Nouvelle-Calédonie où les spécialistes du commerce extérieur de toute la zone Pacifique se sont réunis. Nous avons abordé aussi d'autres sujets. Nous avons abordé aussi d'autres sujets car nous avons le besoin, en transmettant l'information, de constamment comparer ce qui existe, les initiatives qui sont prises, d'opérer en "benchmarking", comme on dirait aujourd'hui. Nous sommes heureux de le faire quand il s'agit d'un succès. Et c'est définitivement le cas avec l'Etoile du Nord. La deuxième raison de ma visite, c'est le fait que ce matin nous avions à l'Université d'Auckland la réunion des chefs de départements français dans les universités néo-zélandaises. Il était question du supérieur, c'est l'autre extrême, on voit le bout de la pyramide de la formation. Au fur et à mesure de la journée, je suis revenu à la base de la pyramide.
Ce qu'elle pourrait être voulez-vous dire ?
Nous avons intérêt, nous, acteurs publics, à bien saisir que ce qui se construit depuis le primaire jusqu'au supérieur. Ce qui va aboutir à l'université commence à la petite école. Il est important que les besoins, les difficultés mais aussi les aspirations de ceux et celles qui apprennent le français soient anticipées. Nous devons nous assurer que ce qui se fait au niveau du secondaire et au niveau du primaire correspond bien aux attentes, de manière renforcer la chaîne. Si on peut exprimer un souhait, c'est qu'en Nouvelle-Zélande, à partir du primaire et jusqu'au supérieur, nous ayons la capacité de suivre la totalité des cycles de formation en français ou avec du français. Je pense qu'à Auckland, ce sera de plus en plus vrai. Evidemment, nous n'avons pas les effectifs suffisants pour justifier un établissement, en revanche, la manière dont se développe la communauté et donc le besoin croissant de scolarisation conduit, à partir des expériences de Richmond et l'Etoile du Nord, à bâtir progressivement une filière qui parte de la maternelle et aille jusqu'à la Terminale.
C'est-à dire construire une école ?
Construire des systèmes. Nous pensons réellement que les filières bilingues, que j'ai eu l'occasion d'expérimenter en Allemagne, fonctionnent bien. Mais cela suppose d'avoir un minimum de vision stratégique et un plan. Ensuite, d'avoir l'accord des autorités au niveau national comme au niveau local. C'est toujours une tâche assez complexe. En l'occurrence, le travail de l'association Frenz a été remarquable pour passer les messages et obtenir des résultats par conviction et persuasion. Le travail de l'Ambassade est de relayer cet effort pour le primaire mais également, le moment venu, pour le secondaire.
Est-ce le projet de l'Intermediate School ?
Voilà, à ce stade, c'est l'Intermediate School, tout en continuant à grandir par ailleurs. Encore une fois, cela va impliquer une multitude d'acteurs. Je pense que c'est collectivement que nous allons progresser, en diffusant autour de nous la conviction que le jeu en vaut la chandelle. Je pense qu'en Nouvelle-Zélande, il existe un biculturalisme qui ne met pas les deux communautés principales, celle de Maoris et la culture d'origine anglo-saxonne, à égalité dans les chiffres mais cette idée de respect pour une culture numériquement minoritaire existe, elle est fondamentale, elle s'applique à fortiori à d'autres cultures minoritaires. Il se trouve que dans le cas Français, pas seulement linguistiquement mais aussi historiquement, nous avons partie liée avec le pays. Les Français étaient là lors de la signature du Traité de Waitangi et notre lien historique avec la Nouvelle-Zélande a ensuite été scellé à l'occasion des deux guerres mondiales, avec l'engagement des contingents des ANZAC. Des souvenirs et une imprégnation historiques qui ne sont pas seulement de la nostalgie mais constituent des traces profondes dans les mémoires. C'est aussi un héritage fort que le porjet d'école permet de poursuivre. Il s'appuie sur des convictions, des expériences, un respect mutuel qui prolongent ce lien direct.
Vous parliez donc du lien fort entre la Nouvelle-Zélande et la France. La Nouvelle-Calédonie n'est pas loin et la présence calédonienne a même été officialisée en quelque sorte avec l'arrivée prochaine d'Yves Lafoy, premier délégué à la Nouvelle Calédonie ?
On peut même dire l'arrivée actuelle d'Yves Lafoy puisqu'au moment où nous parlons, il est déjà en place, physiquement présent et actif. Nous sommes très heureux d e cet aboutissement à l'issue d'une période de mise au point des conventions, des autorités parisiennes et du territoire. Nous concrétisons un engagement entre l'Etat et le gouvernement de Nouvelle-Calédonie à développer l'insertion régionale de la Nouvelle-Calédonie à travers une représentation spécifique. C'est un dispositif qui a lui-même vocation à être déployé à l'échelle régionale (à Fidji, à Vanuatu, en Papouasie Nouvelle-Guinée, sans oublier l'Australie). Là où les pays ont des liens forts avec la Nouvelle-Calédonie, les ambassades de France ont vocation à avoir ce relais permettant de développer la représentation, la coopération, et de « créer du lien » entre le Caillou et les pays environnants. Et nous commençons dès maintenant en Nouvelle-Zélande.
Est-ce une manière d'anticiper l'issue possible du référendum de 2014 sur l'indépendance ?
Nous devons clairement distinguer ce que sera le processus référendaire dont l'issue est respectable par définition, et la manière de construire les liens d'une entité, avec son environnement. Il est absolument nécessaire que culturellement, commercialement, humainement et politiquement, la Nouvelle-Calédonie existe dans son environnement. Cela passe par des relais diplomatiques et c'est une vraie valeur ajoutée dans le cadre de nos engagement internationaux. Nous sommes dans une logique de développement et l'administration suit cette orientation mais l'outil ne prédétermine aucune orientation politique. Nous suivons une ligne tracée depuis 1998 et inscrite dans la Constitution.
Ce sera le rôle d'Yves Lafoy d'apporter une contribution au dialogue diplomatique ?
Absolument. Il a une identité propre qui est bien repérée dans l'organisation de l'ambassade. A l'extérieur de l'ambassade, il faut qu'on sache qu'il existe et nous allons nous employer à le faire savoir. Yves Lafoy connaît bien les questions de coopération et l'univers des organisations régionales, il est marié à une Néo-zélandaise, il est à l'aise en Nouvelle-Zélande. Il connait également très bien l'univers de la recherche scientifique et de la coopération internationale en Nouvelle-Calédonie. On peut avoir des exigences élevées avec un tel profil.
Que retenez-vous de votre réunion avec les Conseillers économiques de la région, les quatre ambassadeurs, le sénateur André Ferrand, et le président d'Ubifrance ?
Très clairement, c'est la nécessité de décliner l'insertion régionale de la Nouvelle-Calédonie sous tous ses aspects. A Nouméa les 14 et 15 novembre, nous étions concentrés sur les questions commerciales. Cela suppose que tous les acteurs publics français se voient, se connaissent, se coordonnent. Mais la conviction était claire et partagée que nous travaillons tous en ce sens. Quelle est la priorité ? En ce qui concerne les ambassadeurs, nous avons une priorité en matière de diplomatie économique. La Nouvelle-Calédonie en fait partie. Qu'est-ce que cela veut dire ? Qu'il faut élaborer des perspectives, avoir des projets et voir comment les réaliser : comment accueillir les acteurs de Nouvelle-Calédonie ? Comment mieux faire connaître la Nouvelle-Calédonie - qui est plus qu'une destination touristique - Comment développer les partenariats ? Il faut s'y consacrer et saisir les occasions, comme la venue des autorités de Nouvelle-Calédonie en Nouvelle-Zélande qui est attendue en 2013 et à laquelle nous travaillons déjà.
Filip Milo (www.lepetitjournal.com/auckland.html) mardi 27 novembre 2012







