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Collectif LoveIsNotTourism : "Pourquoi vouloir “contrôler” l’amour ?"

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Écrit par Lepetitjournal.com International
Publié le 25 août 2020, mis à jour le 27 août 2020

Le collectif LoveIsNotTourism France, qui regroupe les couples binationaux séparés par la pandémie, a envoyé une lettre ouverte au président Emmanuel Macron pour lui demander une solution pour les milliers de couples « invisibles ». Voici le contenu de cette lettre : 

 

Lettre ouverte à Monsieur le Président de La République française M. Emmanuel MACRON, à propos de l’entrée des couples binationaux sur le territoire

Monsieur le Président de la République française, M. Emmanuel MACRON.

Nous avions interpellé une première fois le Premier Ministre M. Jean Castex, le Ministre de l’Europe et des Affaires Étrangères M. Jean-Yves Le Drian et le Ministre de l’Intérieur M. Gérald Darmanin à la date du 07/08/2020 sur le statut des couples binationaux dans un contexte de crise épidémique de COVID 19.

Dans cette première lettre que vous pouvez consulter icinous avions proposé une solution « Clef en main » à votre Gouvernement. Cette solution aurait inclus la France dans un processus conforme aux préconisations de la Commission Européenne, et proposait un modèle similaire à celui de notre voisin aux Pays-Bas qui a été l’un des premiers à la mettre en place. Toujours conscients des risques sanitaires, nous avions fait en sorte que cette proposition ne rajoute aucun risque supplémentaire pour la France puisqu'elle prévoyait la présentation de la preuve d’un test négatif au COVID 19 datant de moins de 72 heures, si besoin.

Le samedi 08 août 2020, M. Le Secrétaire d’Etat M. Jean-Baptiste Lemoyne chargé du Tourisme , des Français de l'Étranger et de la Francophonie a déclaré dans le JDD (Journal Du Dimanche) : nous le citons : “ La France met en place un dispositif spécifique pour les partenaires de vie séparés par la fermeture des frontières. Dès cette semaine, une demande de laissez-passer peut être déposée auprès du consulat le plus proche. Ce virus n’aime pas l’amour, nous si ! ”

le 10 Août 2020 ​Le Secrétaire d’Etat M. Jean-Baptiste Lemoyne chargé du Tourisme , des Français de l'Étranger et de la Francophonie a déclaré sur France 3, nous le citons : “Nous visons un délai d’instruction de 8 à 10 jours maximum pour apporter à ces couples qui je le rappelle ont été séparés depuis plusieurs mois”

 

Nous sommes aujourd’hui le 23/08/2020 et nous ne constatons encore aucune réponse, mis à part des réponses négatives.

Monsieur le Président, nous vous interpellons sur le fait que le Secrétaire d’Etat M. Lemoyne aime l’amour, mais au vu de la solution proposée, nous pensons qu’il aime aussi beaucoup la complication !

Le Gouvernement semble-t-il, découvrait alors qu’il existait des couples séparés par les frontières. Nous vous avions pourtant alerté de cette situation par des courriers personnels auprès de votre cabinet, et ce, depuis le mois d’avril.

Aujourd’hui, M. le Président de la République française, c’est directement à vous que notre Collectif LoveIsNotTourism France​ souhaite s’adresser.

Nous nous sommes efforcés de comprendre pourquoi votre Gouvernement en est arrivé à compliquer les choses alors que notre besoin est pourtant simple: ​Nous souhaitons seulement retrouver nos partenaires comme nous le faisions habituellement avant que ne démarre cette crise épidémique de la COVID 19.

Avant cette crise, il était possible de nous retrouver avec un visa court séjour, mais les couples étaient “invisibles” (car noyés dans le flux touristique) . C’est à cause de cette situation épidémique, du confinement, et de la fermeture des frontières, que cela est devenu statistiquement visible : Nous sommes passés de 0 à 2000 couples d’un coup.

Il semble que c’est à cause de cela, que le Gouvernement a voulu s’obstiner à faire évoluer le visa famille3, en passant par une ouverture aux couples pacsés et aux concubins, ce qui part d’une intention louable, mais malheureusement pas adaptée au besoin des couples dont nous parlons ici. Le gouvernement semble ensuite avoir voulu continuer dans cette logique, pour les couples non mariés : ​le ministère de l'Intérieur ayant peur d’un risque d'immigration non contrôlable.

Nos études internes montrent que les couples non mariés concernés, pouvant se permettre de voyager et de se retrouver fréquemment dans divers pays, appartiennent généralement à une classe sociale différente que ce qui est considéré comme de l'immigration aux yeux de l’opinion publique. Donc, je vous le demande : ​Sommes-nous, toujours à vos yeux une "filière d’immigration illégale et potentiellement dangereuse ?".

P​ourtant, il existait déjà un certain équilibre avec les régulations sur la délivrance des visas court séjour dans certains pays.

Donc oui, les touristes ne sont pas forcément des couples, mais les couples pouvaient utiliser un visa tourisme (court séjour) pour se retrouver, au-delà de toute statistique.

Mais par rapport aux contraintes liées à la fermeture des frontières à cause de COVID, soyons clair, le réel besoin est simplement de pouvoir faire la différence entre un touriste et quelqu’un qui veut rejoindre sa ​moitié​.

Pourquoi  avoir eu besoin d’inventer une solution “à la Française”, alors que la solution existait déjà ?

Pourquoi vouloir “contrôler” l’amour ?

Dans les faits et en observant la réalité du terrain (après retour des couples et avec e-mails à l’appui)

la solution choisie semble être la suivante :

  • Un des deux partenaires doit être de nationalité française et résider en France.
  • Le couple doit et être ensemble depuis plus de 6 mois (avant la période du COVID 19)
  • Le couple doit fournir des preuves de vie commune, ou au moins qu’il se soit retrouvé plusieurs fois sur le sol français ensemble.

Se posent alors quelques questions fondamentales:

  • Cela prouve-t-il qu’un couple est amoureux ?
  • Verlaine, Sartre, Hugo, Maupassant, de Musset, Sand, Apollinaire ... ne risquent-ils pas de se retourner dans leurs tombes après ça ?
  • Mais surtout, pourquoi ? Mais alors pourquoi ! Est-il si important de devoir prouver l’amour entre deux êtres, pour avoir la permission de se retrouver ?

 

La solution de votre Gouvernement, parce qu’elle est restrictive, crée ​plus de problèmes que ce qu’elle n'en règle​: Comment peut-on juger ou vouloir prouver qu’un couple s’aime en limitant ​cela à sa nationalité et au nombre de fois où ils se sont rencontrés physiquement en France?

De plus, afin de prouver notre amour, il est demandé un grand nombre de pièces, parfois très personnelles, qui dans certains cas peuvent atteindre à la sécurité des personnes, on peut se demander si cela ne porte pas aussi, atteinte à la vie privée.

C’est pourquoi nous portons ​à votre attention qu'à aucun moment, les consulats lors de la constitution des données ne nous ont prévenus de l'utilisation faite de celle-ci, comme le préconise pourtant la RGPD européen.

Alors, pourquoi continuer sur cette voie? Certains témoignages soulignent des discriminations, du stress qui s'ajoute à celui déjà existant depuis tous ces mois d’attente, avec par-dessus tout cela des lourdeurs administratives kafkaïennes. Les consulats sont déjà surchargés, et au vu des délais de réponse annoncés , les frontières auront le temps de rouvrir avant la fin de traitement de certains dossiers.

Que comptez-vous faire à ce moment-là ? Allez-vous finalement revenir sur les règles ayant cours avant la COVID que le Gouvernement refuse d’utiliser aujourd’hui, ou allez-vous continuer à vous acharner à vouloir contrôler la vie privée des couples binationaux ?

 

Peut-être avez-vous l’intention de contrôler qui a ou non, le droit d'aimer en France?

 

Le reste du monde qui pense que la France est le pays de l’amour et que Paris en est la capitale, ne risque-t-il pas d'être choqué par tant d'incohérence ?

 

De nombreux pays européens ont déjà su nous montrer la voie et restent un exemple pour tous les couples. Ce que ces pays ont appliqué est très proche de la proposition que nous avions faite dans la lettre ouverte aux ministres. ​Si le Gouvernement nous avait écouté... La procédure aurait été bien plus simple, rapide, et cela ​n’aurait pas créé toute cette polémique. Il eut été normal que la France montre l’exemple en tant que pays défenseur des Droits de l’Homme symbolisant l’amour et la démocratie.

 

Bon nombre d’entre nous sont actuellement en grande souffrance, stressée, désespérés : une étude9 a été réalisée sur 459 personnes montre que l’état de santé de plusieurs de nos membres devient critique, certains ont même parlé de mettre fin à leurs jours, malgré le soutien moral que nous essayons de leur apporter, cet état ne s'améliorera pas sans mesure concrète, simple et lisible, rapide et efficace de la part du gouvernement.

 

Mais même si pour M le Secrétaire d’Etat M Lemoyne qui annonce: “ce virus n’aime pas l’amour, nous si!” empiriquement, il est impossible d’apporter des preuves à l’existence de l’amour et il n’y a aucune frontière à celui-ci ! Et comme le disait il y a exactement 200 ans, un humble citoyen français du nom de Alphonse de Lamartine, qui fut aussi ministre des Affaires étrangères : “un seul être vous manque et tout vous paraît dépeuplé” cette citation est malheureusement toujours valable de nos jours.

 

Nous vous prions d’a​gréer, Monsieur le Président de la République, Mr Emmanuel Macron, l’expression de nos très hautes considérations.

 

loveisnottourism france

 

Annexes

 

Liste des dysfonctionnements liés au dispositif actuel

Suite à l’annonce du 08/08/2020 de M. le secrétaire d’État Jean Baptiste Lemoyne au sujet de la dérogation permettant aux couples non mariés de se retrouver. Ce dispositif impose de fournir des preuves que l’on est effectivement en couple. Voici une liste non exhaustive d’un certain nombre de dysfonctionnements liés à cette dérogation, et aux preuves demandées :

 

  • Un(e) ressortissant(e) étranger(e) ayant un droit de séjour légal en France ne peut pas bénéficier de la mesure.
  • Il n’est pas considéré comme une preuve de vie commune si les deux partenaires ne se sont pas retrouvés ensemble sur le territoire Français au moins une fois (plusieurs fois de préférence). Même s’ils ont vécu ensemble pendant plusieurs mois ou années, dans un autre pays.
  • Cas des couples LGBT dont l’un des deux partenaires réside dans un pays où l’homosexualité est interdite. Cette personne risque la peine de mort à cause des éléments de preuves demandés et du délai d’instruction, si le pays d’origine en a connaissance.
  • Les couples de moins de 6 mois ne sont pas considérés comme étant des couples ....
  • Les personnes en couple dans un pays tiers (et qui dans certains cas ont eu un enfant né dans ce pays, indistinctement du niveau médical dans le pays) ne sont pas éligibles à cette procédure : le père Français peut rentrer, mais pas la mère et son enfant.
  • Certains consulats bloquent les couples en instance de mariage, même avec la déclaration des bans.
  • Les couples qui devaient se marier et qui généralement utilisaient pour cela un visa tourisme, sont souvent désormais obligés d’utiliser un visa mariage (qui demande d’avoir fait la déclaration des bans) : il est possible que les mairies ne puissent pas délivrer l’attestation de non dénonciation des bans à temps pour un visa, et certains consulats ne veulent pas délivrer un visa de mariage, même si le dossier est complet.
  • Les enfants de l’un des deux partenaires, mais issus d’une précédente union ne peuvent pas obtenir de laissez-passer : comment peut-on séparer un enfant de sa mère ou de son père? C’est encore plus vrai dans le cas d’un futur mariage.
  • Les instructions envoyées par le ministère sont interprétées ou communiquer de façon différente en fonction des consulats : Les consulats sont tous différent, ils peuvent avoir plus ou moins de demandes et plus ou moins de personnes qui en font le traitement : ils sont aussi souvent saturés, stressés : délais d’attente importants, peu de retours d’informations, pouvant entraîner des conflits...
  • Il y a eu peu d’informations réelles sur cette dérogation par le gouvernement. Il y a des différences d’informations entre les consulats. Il reste encore des zones d’ombres, comme par exemple, le processus d’obtention d’un visa après l’obtention du laissez-passer pour les pays qui en ont besoin.
  • Les consulats ne répondent pas forcément aux bonnes questions posées, et peuvent dans certains cas répondre agressivement, proche de la discrimination. Sans humanité.
  • Cela ralentit les autres procédures usuelles des consulats : exemple retranscriptions de mariage : les nouveaux mariés ne peuvent pas faire de demande de laissez-passer. Même problématique pour les enfants nées entre temps. Durant cette période il leur est impossible de faire une demande de laissez-passer dérogatoire.
  • Pas de suivi de dossier, pas d’accusé de réception et de numéro de dossier ou de référence permettant d'assurer rapidement le suivi.
  • Les passeports sont renouvelés périodiquement, il est donc dans certains possibles qu’une partie des éléments de preuves demandées ( stamps, visa ) ne soient plus disponibles et entraîne le refus des consulats lors de l’étude des dossiers.
  • Il semble aussi que certains consulats refusent de considérer que les personnes sont en couple (même si c’est le cas depuis des années ) s’il n’y a pas eu un voyage récent en France (moins de 1an et demi)

Cliquez ici pour lire la lettre complète

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Publié le 25 août 2020, mis à jour le 27 août 2020