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TO SINGAPORE WITH LOVE – Illustration des divergences entre le gouvernement et le monde des Arts sur la manière de parler de l’Histoire.

Écrit par Lepetitjournal Singapour
Publié le 13 octobre 2014, mis à jour le 15 octobre 2014

Lorsque, le 10 septembre 2014, la Media Development Authority a donné au film de Tan Pin Pin "to singapore with love" la classification "not allowed for all ratings", s'est ouvert un débat nourri, qui dure encore, entre le monde des Arts et le gouvernement sur la manière de rendre compte de l'Histoire et particulièrement des interprétations divergentes de certains évènements.

To Singapore with Love
Saisie en Juin 2014 par la National University of Singapore (NUS), d'une demande de classification du film "To Singapore with Love", que l'Université souhaitait projeter en même temps que deux autres films – Singapore Gaga et The invisible City -  de la réalisatrice singapourienne Tan Pin Pin, la Media Development Authority (MDA) a attribué au film le rating "Not allowed for all ratings". Une classification qui aboutit à une interdiction de présenter le film au grand public ; même si la MDA a précisé depuis que "not allowed for all ratings" ne signifiait pas interdiction puisqu'il était possible de voir le film à titre privé ou dans le cadre de programmes d'études spécifiques.

Si la décision a fait débat, c'est qu'elle souligne, entre la position de la MDA et plus généralement du gouvernement de Singapour, d'une part, et le monde de la culture d'autre part, les différences de vue quant à la manière de parler de l'Histoire et particulièrement d'ouvrir, ou de ne pas ouvrir le dialogue sur les évènements qui peuvent donner lieux à des interprétations divergentes.

Le Film de Tan Pin Pin, "To Singapore with Love" est un film documentaire dans lequel la cinéaste s'est intéressée à la vie quotidienne de plusieurs "exilés" et à la manière dont ils continuent à percevoir Singapour. La MDA avait en septembre justifié sa décision par le fait que le contenu des témoignages était de nature à nuire à la sécurité nationale : "les personnes interviewées dans le film font un compte-rendu faussé des circonstance dans lesquelles elles ont été conduites à quitter Singapour et à rester en dehors de Singapour" ; "un certain nombre des personnes interrogées, auto-proclamées "exilées", étaient membres ou des soutiens du "Communist Party of Malaya" (CPM), interdit".

Le ministre de l'Information et de la Communication, le Dr Yaacob Ibrahim, en appui à la décision de la MDA, a souligné concernant les personnes interviewées  que "plusieurs étaient membres du CPM qui avait cherché à renverser les gouvernements légitimement élus de Singapour et de Malaisie par la lutte armée et la subversion, pour les remplacer par un régime communiste". "Des personnes qui ont choisi de quitter et de rester en dehors de Singapour, qui ont refusé de rendre compte de leurs actions passées, ne devraient pas pouvoir utiliser des plateformes publiques pour faire un compte-rendu altéré et contraire à la vérité, de nature à tromper le public, à s'auto-absoudre, et à nier leurs actions passées".

De son coté, la réalisatrice Tan Pin Pin, qui vient, le 2 octobre, de faire appel de la décision de la MDA en soumettant son film, non modifié, une seconde fois pour classification, insiste sur le fait que son documentaire porte essentiellement sur la vie quotidienne des personnes interviewées. Elle avait espéré, explique-t-elle "que le film serait l'occasion d'un dialogue national qui aurait permis aux Singapouriens de mieux se comprendre en tant que nation". "Il est vital pour nous, insiste-t-elle, d'avoir ce dialogue dans nos propres termes, particulièrement à la veille de notre 50ème anniversaire".

Le film "To Singapore with love" a été soutenu par 38 membres de la communauté des Arts et du Cinéma, parmi lesquels Anthony Chen, Sasitharan, l'ancienne députée Janice Koh ou Alvin Tan, qui ont publié le lendemain de la décision de la MDA, une déclaration faisant part de leur déception. Même l'éditorialiste du Straits Times, Chua Mui Hoong, rapporte wikipedia, a marqué son désaccord avec le rating, écrivant : "quand il y a des divergences sur l'interprétation des évènements, comme l'arrestation des activistes gauchistes dans les années 60-80, la meilleure antidote n'est pas l'interdiction de certains points de vue, mais plus d'ouverture et d'accès à l'information". Elle aurait, selon la même source, fait partie d'un groupe de 350 Singapouriens qui auraient fait le déplacement à Johor Baru (en Malaisie) pour voir le film.

Bertrand Fouquoire (www.lepetitjournal.com/singapour) mardi 14 octobre 2014

A lire: Page Facebook "to Singapore with Love"

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Publié le 13 octobre 2014, mis à jour le 15 octobre 2014

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