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DÉCÈS DE PIERRE CAHEN - La communauté française d'El Salvador a perdu un de ses pères fondateurs

Écrit par Lepetitjournal San Salvador
Publié le 20 octobre 2016, mis à jour le 20 octobre 2016

 

Pierre Cahen était un homme discret, modeste, à l'écoute de tous et humble. Il avait toutes ces qualités parce qu'il avait connu des heures difficiles.

 Pierre était arrivé au Salvador dans les années 1950. A cette époque, l'Amérique centrale était une terre lointaine, de découvertes dans une Amérique latine mythique mais tellement proche par son affection de la France. C'était l'époque de l'après-guerre.

La reconstruction en Europe était indispensable. Elle l'était dans les esprits également. 

Pierre Cahen

C'est bien pourquoi Pierre est venu au Salvador avec cet état d'esprit qui ne l'a jamais quitté: l'optimisme, la volonté de penser à demain, être pragmatique sans s'interdire de rêver. À cette époque, les Français d'El Salvador se comptaient sur les doigts d'une main. Ils devinrent des piliers : avec Pierre CAHEN, MM. Roberto KAHN, Pierre HOUDELOT, Philippe LAENNEC, Jean-Claude KAHN ont su favoriser l'éclosion d'une France au Salvador, présente dans tous les domaines. Sur le plan économique, chacun était un entrepreneur ou représentait une grande société française tel Philippe LAENNEC et Air France. Dans les domaines de la culture, ils ont tous soutenu des peintres et les initiatives artistiques longtemps portées par exemple par la peintre Licry BICARD et Janine JANOWSKI qui était la marraine de tant de peintres centraméricains dans les années 1970, 1980 et 1990 avec sa fameuse galerie El Laberinto. 

Nos mousquetaires, car tel était leur surnom, ont été à l'origine des grands projets de la présence permanente de la France au Salvador et avant tout, le lycée français Antoine et Consuelo de Saint- Exupéry à Santa Tecla. À l'époque et jusqu'au milieu des années 1990, le lycée occupait un terrain, beaucoup plus petit que celui d'aujourd'hui, entouré de cafetales, de plantations de café. Aujourd'hui, Santa Tecla est le prolongement urbain de San Salvador. Mais à l'époque, Santa Tecla était à l'extérieur de la ville, adossé au volcan, entre les plantations de café. Une Amérique centrale qui disparaît. Le bâtiment central du lycée, qui vient d'ailleurs d'être démoli pour laisser place à la dernière phase de transformation de l'établissement, rassemblait le collège et le lycée. La junta directiva rassemblait nos mousquetaires, les parents d'élèves, et le directeur du lycée qui arrivait de Paris depuis les années 1970. 

L'actuel lycée français e San Salvador 

Pierre, Robert, Philippe, et beaucoup d'autres, ont tenu bon à partir de 1979, quand El Salvador a, petit à petit, sombré dans la guerre civile. L'ambassade de France a été à cette époque victime d'une prise d'otages et n'a été rouverte que dans les années 1980, en 1985, avec l'arrivée d'un ambassadeur, à l'époque Alain Rouquié, marquant une nouvelle forme de normalisation  bilatérale. Pierre avait tenu bon: ensemble ils ont continué à maintenir debout le lycée et à dire qu'El Salvador était un pays, malgré le conflit, où les entreprises notamment de services, pouvaient se développer et s'étendre en Amérique centrale. Et ça a marché ! 

 "entouré de cafetales, de plantations de café"

Il a constitué sa famille, en se mariant avec Lorena, d'origine chilienne, une femme de c?ur et d'engagements, qui a adopté El Salvador et la France. Elle a donné à Pierre trois enfants qui perpétuent l'esprit de leurs parents: David, Denise et Daniel. Pas un n'a manqué à l'idée de développer la présence de la France au Salvador.  

Pierre était présent aussi dans le milieu associatif: il a créé dans les années 1980 l'Union des Français de l'étranger (UFE) dont la mission est d'être aux côtés des Français, de tous les Français. Car ce qui caractérisait Pierre, comme son ami Roberto KAHN, était cette conviction de devoir être à l'écoute de tous et en tout cas du plus grand nombre, car eux avaient vécu les heures les plus sombres, les heures durant lesquelles la France pouvait disparaître, les moments où la vie ne tient qu'à un fil et s'écoule seconde après seconde. 

La joie de Pierre était de voir ses enfants et désormais ses petits-enfants grandir. Mais sa famille, c'était aussi cette représentation de la France au Salvador: le lycée a énormément grandi comme la communauté française qui désormais compte plus de 600 membres. De jeunes entrepreneurs sont venus s'installer au Salvador, la chambre de commerce se développe. 

Nous avons tous connu, dans nos vies à l'étranger, des compatriotes qui ont de sacrées personnalités parce que ce sont des pionniers. Pour ma part, j'ai eu la joie d'en croiser sur plusieurs continents, et en Amérique latine, sans doute parce que ce continent vibre très fort, un peu partout, de Mexico à Santiago, de Lima à Rio de Janeiro, de Saint Domingue à Cuba ou Panama. Au Salvador, cette âme pionnière était incarnée par ces mousquetaires qui comptaient Pierre CAHEN en leur sein. 

Volcan de San Salvador

Il est resté lui même toute sa vie: debout, généreux, au service des autres, pilier d'une famille qui porte des valeurs et un sens de l'honneur qu'il a imposé au sein de la communauté, avec ses amis de toujours, les pères fondateurs de la France au Salvador. J'ai eu l'honneur de compter depuis mon premier séjour au Salvador en 1988, parmi ses amis et de gagner l'affection de sa famille et notamment de ses enfants qui sont désormais aussi, ma famille. À nous de perpétuer ce message de volonté, de simplicité, mais aussi d'efficacité mais toujours avec beaucoup de c?ur. Cela s'appelle l'Honneur et l'amour de la vie. Merci Pierre CAHEN pour tout ce que vous avez fait et surtout, pour ces valeurs que vous avez su transmettre et qui font l'honneur de la France en El Salvador

In memoriam avec Roberto KAHN , Philippe LAENNEC, Janine JANOWSKI  

Pascal DROUHAUD avec LPJSanSalvador jeudi 20 octobre 2016

lepetitjournal.com san salvador
Publié le 20 octobre 2016, mis à jour le 20 octobre 2016