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DELICIEL - Des Français audacieux venus faire du fromage en terres dominicaines

Écrit par Lepetitjournal République Dominicaine
Publié le 3 décembre 2015, mis à jour le 4 décembre 2015

 

Produire du fromage français en République dominicaine ? Il fallait être un peu fou pour oser une telle aventure… C'est pourtant ce que Jean-Lin Leurent et son épouse Mijo ont fait. C'était à l'orée des années 1980. Le couple débarque en République dominicaine à une époque où le tourisme lui-même n'y a pas encore jeté son dévolu. Jean-lin (ci-contre avec sa fille et son gendre) est alors diplomate, « mais par erreur », confie-t-il dans un sourire. Issu d'une famille d'industriels du textile du Nord de la France, il n'allait pas tarder en effet à être rattrapé par ses gènes. Le déclic ? Son rôle de « facilitateur » de l'implantation du Cub Med qu'il endosse un temps dans le cadre de la mission économique de l'ambassade. Il découvre le spot idéal pour le centre de vacances : Punta Cana, encore vierge. Et suit les péripéties de la mise en place d'un tel projet dans un pays qui limite alors les importations. « La question cruciale de l'alimentation et du fromage s'est posée, surtout pour un groupe français… Je me suis dit pourquoi ne pas essayer d'en produire sur place, il y avait bien du lait en République dominicaine !  ». 
 
Jean-Lin et Mijo (ci-contre, en 1982) s'improvisent alors apprentis-fromagers dans le jardin de la maison de Saint-Domingue où ils se sont installés. Ils font venir de France des ingénieurs et spécialistes à la retraite séduits par l'idée de vacances expérimentales sous le soleil d'Hispaniola. Et après moult essais, bingo ! Le premier Camenbert made in rep dom voit le jour. Une petite usine de fabrication est alors construite sur le terrain jouxtant la maison. D'autres spécialités fromagères françaises suivent, pour être livrées dans les hôtels. Mais surtout, le couple Leurent crée des yaourts qui prendront rapidement le devant de la scène. « C'était LE produit rentable », se souvient Jean-Lin dont l'entreprise qui s'appelait alors Yoka deviendra leader sur le marché du yaourt dans le pays pendant 25 ans.

Quatre filles et des yaourts à succès
Au fil des années, l'unité de production confidentielle s'étend telle une favela. Sur les terrains alentour poussent des fruits exploités pour les coulis des yaourts. Et dans la maison, observant l'entreprise familiale prendre de l'ampleur, grandissent les quatre filles de l'entrepreneur Leurent. Elles fréquentent le Lycée français, profitent d'un cadre de vie idéal, mais jalousent un peu le travail qui « vampirise » leurs parents. « Ils se sont impliqués à 200 %, la semaine, les week-ends, se souvient Gaëlle, l'une d'entre elles. Quand nous sommes retournées en France pour nos études, avec mes sœurs, nous avons renoué avec nos racines et j'avoue que nous ne pensions pas alors revenir un jour ». Un diplôme d'agronomie, dix ans d'expérience professionnelle, un mari, et trois enfants plus tard, la voilà pourtant de retour. Depuis deux ans.

Une nouvelle aventure dominicaine dans laquelle elle a entrainé cette fois-ci son époux français, Yves Demouy. Même blondeur, mêmes yeux bleus, même diplôme que son épouse, et une passion identique au fond du regard pour leur défi commun : assurer la poursuite de l'entreprise créée par les parents de Gaëlle. Aujourd'hui, celle-ci s'appelle Deliciel. Il y a tout juste dix ans, Jean-Lin a en effet revendu la success-story Yoka, se recentrant sur les fromages au sein de cette structure.

Une nouvelle génération, et de nouveaux défis

Tandis qu'il passe peu à peu le relais, Gaëlle et Yves s'approprient Deliciel. Se projettent. S'impliquent à 200%. Une histoire de gènes paraît-il ! Et pas seulement. Même Yves, qui a quitté une carrière dans les Eaux et Forêts et qui ne connaissait quasi rien, ni du fromage, ni de la République dominicaine, déambule dans les hâloirs comme si c'était sa seconde maison (ci-contre). De son côté, Gaëlle place toute son énergie dans le développement de nouveaux produits, et la conquête de nouveaux marchés, celui du fromage restant relativement restreint dans le pays.

« Nous travaillons notamment sur des produits autour des fruits. Autant profiter des matières premières du territoire sur lequel nous vivons. Nous en cultivons nous-mêmes depuis longtemps ». Après avoir relevé le lourd défi de mettre au point pour les hôtels des pâtes de fruits 100% naturelles et résistant au contexte climatique, Deliciel remporte un vrai succès auprès du secteur touristique avec ses pots de confiture petit format. Parallèlement,  l'entreprise lance depuis quelques semaines la commercialisation d'un projet à plus grande échelle : les compotes en berlingot.. « Elles s'appellent Glup, j'y crois énormément, confesse Gaëlle. En tant que maman, j'ai constaté que ce qu'on trouve dans les rayons dominicains aujourd'hui est importé, souvent pauvre sur le plan nutritionnel. C'est ainsi qu'a germé l'idée de proposer quelque chose de différent, de qualitatif. Dans les Glup, hormis l'emballage qui vient du Costa Rica, tout est local, naturel. Les petits Dominicains mangent de plus en plus à l'extérieur et les familles sont de plus en plus sensibilisées à l'équilibre alimentaire, il y a un marché ! »

Un enthousiasme partagé par sa famille, et porté par une équipe fidèle au clan Leurent depuis bien longtemps. Une soixantaine d'employés dominicains dont « l'optimisme, l'envie, la fierté de travailler » fascine encore le jeune couple français. De bon augure pour ce nouveau chapitre de l'aventure familiale en terre dominicaine…

Deliciel produit 15 variétés de fromages à base de laits de chèvre et de vache provenant de trois fermes locales.

Pour cela, environ 20 000 litres de lait sont transformés par semaine. Évidemment, au vu du climat et des risques sanitaires, pas question de produire des fromages au lait cru, tout est pasteurisé. L'usine de production suit des règles d'hygiène strictes.

Florence Buades / Photos Alain Brun-Jacob (www.lepetitjournal.com/republique-dominicaine),  vendredi 4 décembre 2015.

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Publié le 3 décembre 2015, mis à jour le 4 décembre 2015

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