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SOCIÉTÉ – Le Ramadan dans l’intimité des familles

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Écrit par Valérie Pivon
Publié le 24 mai 2017, mis à jour le 2 mai 2018

Le 15 mai l'Indonésie entre dans le mois du Ramadan. Dans le plus vaste pays musulman au monde le jeûne est suivi par une grande majorité de la population. Il est avant tout un moment de retrouvailles familiales, de recueillements, de réflexions spirituelles, d'intensification de la pratique du culte mais aussi d'échanges et de partages. Nous avons rencontré Nida, Nani, Indri et des lycénnes du Lycée Français de Jakarta qui nous ont expliqué leur ramadan, leur tradition, leur perception du moment. Pendant un mois, tout musulman qui pratique le jeûne ni ne mange ni ne boit ni ne fume et doit s'abstenir de tout péché. 

Dans les faits le Ramadan commence bien avant le début du jeûne. On remarque depuis quelque temps déjà une grande activité autour des cimetières. « La tradition veut que les Indonésiens se rendent au cimetière avant le début du Ramadan c'est ce que nous appelons le Nyadran. Nous nettoyons les tombes de nos parents, grands-parents puis nous les aspergeons d'eau parfumée, nous y déposons aussi des fleurs ou des pétales de roses. Ensuite nous récitons des prières » nous explique Nida. Pour ceux qui n'auront pas pu se déplacer pendant l'année le mois du Ramadan sera l'occasion de venir se recueillir.

Avant le jeûne, les familles pratiquent la cérémonie du Munggaha. Chez Nani ou Indri comme dans la plupart des foyers indonésiens, le Munggaha est une réunion familiale. C'est l'occasion de se retrouver autour de bons plats traditionnels tels que le boeuf rendang, les currys et de se demander pardon afin de commencer le mois du Ramadan sans mauvais sentiment. Comme l'explique Indri le pardon est très important pendant ce mois, on demande «  Minta Maaf » , je te demande pardon, à sa voisine, à son collègue, à sa famille sans avoir besoin de donner de plus amples explications.

Les premières journées de jeûne commencent enfin et les femmes doivent se lever vers 3h du matin pour cuisiner. C'est l'appel du muezzin, puis celui des enfants du quartier. Avec des tambours ils vont réveiller les habitants et leur rappeler qu'il est l'heure de déjeuner et de prier avant le lever du jour. À la tombée de la nuit, c'est à nouveau à l'appel du muezzin que les pratiquants rompent le jeûne, ce moment est appellé buka puasa. Nida nous explique qu' « avant de prier la tradition veut que l'on commence toujours par manger quelque chose de sucré comme une date accompagnée d'un thé chaud ou d'un verre d'eau ». Pour Indri, buka puasa est l'occasion de retrouver des amis, un soir ceux des années lycées, un soir les amies, un autre soir la famille proche puis les voisins. Alors nous posons enfin la question qui nous taraude tous : « mais n'est-ce pas trop difficile ce jeûne après plusieurs jours ? » Nida nous répond que non, le plus compliqué est de garder des pensées positives, car après trois semaines la fatigue se fait sentir et on peut avoir tendance à s'emporter un peu rapidement. Il faut faire des efforts pour se maitriser. C'est ça aussi que nous enseigne le Ramadan.

L'importance de la cuisine pendant le mois de Ramadan

Parmi les plats et coutumes culinaires que l'on retrouve durant ce mois, le ketupat est l'un des plats emblématiques. C'est un petit panier fait de feuilles de cocotier tressées dans lequel on fera cuire du riz. La cuisson du riz dure entre 6 et 8 heures. Dans le quartier d'Indri à l'ouest de Jakarta, c'est l'occasion de

faire une cuisson commune avec les voisines et de profiter de ce moment pour se retrouver. Ces paniers de riz sont ensuite dégustés accompagnés de légumes, de poisson ou de viande. Certains fruits comme le timun suri  qui ressemble à un gros concombre jaune est plus particulièrement consommé pendant cette période. On le sert coupé en petits morceaux arrosés de sirop et de glace pilée tout comme le blewah qui est un genre de melon. Ce sont des desserts rafraichissants que tout un chacun savoure chaque soir au moment de la rupture du jeûne.

Le Ramadan vu par la jeune génération

Pour les lycéennes que nous avons rencontrés, Géraldine, Aïcha et Gabrielle, le mois du Ramadan est un mois important. Elles attendent avec impatience cette période festive qui est pour elles l'occasion de passer plus de temps en famille, de réfléchir, de partager. Pour Aïcha, la première journée est symbolique. Tous les repas sont pris en famille ce qui n'est pas souvent le cas tout au long de l'année car tous les membres de sa famille ne travaillent pas forcément à Jakarta. Géraldine insiste pour sa part sur la place importante donnée aux plus pauvres et aux orphelins pendant ce mois sacré. La porte des maisons leurs est toujours ouverte. Pour Gabrielle enfin, le plus beau moment est celui du dernier jour où tous se retrouvent à la mosquée ou dans la rue pour prier au levé du jour. « On ressent un sentiment de plénitude et d'appartenance à une communauté ». Vient ensuite le moment des retrouvailles familiales. Pour ceux qui ne sont pas originaires de Jakarta on planifie un retour au village des grands-parents. S'ils sont décédés, la famille se retrouve alors chez le frère ou la sœur aînés. On passe de famille en famille pour partager un moment autour de douceurs. Les enfants reçoivent des enveloppes avec de l'argent, beaucoup moins lorsque l'on grandit au grand désespoir de Gabrielle. Nos jeunes étudiantes quant à elles, célèbreront la fin du Ramadan appelée Lebaran à Jakarta car dès le 18 juin elles passeront les épreuves du baccalauréat.

Pour aller plus loin : Une visite l'après-midi, pendant le mois du Ramadan est recommandée du côté des marchés de Pasar Bendungan Hilir à Senayan ou de Pasar Senen près de la gare de Senen au centre de Jakarta. Vous y découvrirez les nombreuses spécialités culinaires proposées pendant ce mois festif. Une balade riche en couleurs et en parfums.

Valerie Pivon
Publié le 24 mai 2017, mis à jour le 2 mai 2018