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Hanoï : une vague d’agressions sexuelles suscite un élan de solidarité

le lac de l'Ouest de Hanoi où se produisent des agressions sexuellesle lac de l'Ouest de Hanoi où se produisent des agressions sexuelles
Écrit par David Luu
Publié le 12 avril 2021, mis à jour le 18 mai 2021

Depuis le début de l’année, les agressions sexuelles sont en forte hausse dans le district de Tay Ho, situé autour du lac de l’Ouest à Hanoï, provoquant un sentiment d’insécurité mais également la mobilisation collective des riverains, des associations et des autorités.
 

Des incidents de plus en plus fréquents

Dans le groupe Facebook non-mixte Hanoi Beautiful composé de 17 400 membres, les témoignages de femmes victimes d’agressions, principalement expatriées, se sont multipliés au cours des derniers mois.

Plus d’une dizaine de témoignages se croisent et racontent les mêmes modes opératoires : des bandes de jeunes hommes vietnamiens d’une vingtaine d’années, masqués et circulant sur des scooters non-immatriculés, empoignent brutalement les fesses ou les seins de passantes avant de prendre la fuite.

Alors qu’elles marchaient le long du lac pour rejoindre le Tay Ta Bar, une éducatrice sud-africaine raconte qu’elle et son amie se sont fait fouetter à coups de ceinture au niveau des bras, des jambes et du torse avant que leurs agresseurs ne s’enfuient en scooter.
 

Une insécurité qui pousse les citoyens, commerces et ONG à se mobiliser

À la suite des récents évènements survenus dans la capitale vietnamienne, un groupe Facebook intitulé Hanoi Nightwatch Community a été créé afin d’apporter un soutien et une visibilité aux victimes et survivantes d’harcèlement et d’agression sexuelle. Cette page compte à ce jour 5 100 membres.

Autre initiative : la campagne « Whistle Tay Ho ». Des sifflets destinés à alerter les gens des alentours en cas d’agression sont désormais disponibles gratuitement dans de nombreux commerces de Tay Ho. Cette initiative est menée par plusieurs gérantes de business basés dans ce quartier. Par la suite, elles ambitionnent d’élargir cette campagne à d’autres districts de Hanoï.
 

sifflets contre les agressions sexuelles à hanoi au vietnam

 


S’inspirant de la campagne britannique #AskForAngela, des affiches expliquant l’utilisation de ce mot codé ont été placardées dans les bars des environs : lorsqu’une personne souhaite signaler un comportement suspect sans attirer l’attention, celle-ci peut demander « Angela » au personnel de l’établissement, qui fera son possible pour l’aider.
 

affiche ask for angela


Enfin, parmi la multitude d’initiatives, on retrouve le projet Hy Vong : quatre ONG impliquées dans la lutte contre les violences basées sur le genre – Batik International, CSAGA, Planète Enfants & Développement et SCDI – effectuent actuellement un travail de sensibilisation et d’aide aux victimes et aux survivantes à travers la mise en place d’une ligne téléphonique, l’organisation de cours de self-défense et la diffusion d’infographies sur le comportement à observer en cas d’agression.
 

affiche sur les agressions sexuelles au vietnam

 

Un mouvement citoyen accompagné par les instances politiques et diplomatiques

Grâce aux différents élans de solidarité menés par les membres de la communauté, les médias se sont emparés de l’affaire et les institutions ont été alertées.

L’Ambassade du Royaume-Uni a été la première à réagir via les réseaux sociaux en publiant des messages de vigilance encourageant ses ressortissants à les contacter en cas d’harcèlement ou d’agression sexuelle. L’Ambassade de France a également publié un message de vigilance contenant des coordonnées d’urgence sur son site Internet.

Le vice-Premier ministre vietnamien a réagi le 5 mars dernier en demandant aux policiers de chercher, d’arrêter et de punir sévèrement les coupables au plus vite. Les premières investigations ont mené à l’interpellation de trois adolescents âgés de 15 à 16 ans. Après avoir été interrogés par la police, les trois garçons ont reconnu les faits qu’ils leur sont reprochés. Cependant, selon la loi actuelle, les mineurs de moins de 16 ans ne peuvent pas être condamnés et encourent une amende limitée à 300 000 VND.

Le 11 mars, l’ambassadeur des États-Unis a adressé une lettre de félicitations à la police de Hanoï pour avoir arrêté les malfaiteurs et pour leur réactivité dans cette affaire.
 

Si les mobilisations citoyennes, associatives et gouvernementales commencent à porter leurs fruits, le combat pour des rues plus sûres à Hanoï ne fait que commencer.