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EGLISE CATHOLIQUE - Son influence dans le système éducatif primaire irlandais remise en question

Écrit par Lepetitjournal Dublin
Publié le 20 août 2015, mis à jour le 21 août 2015

L'Église catholique garde encore aujourd'hui un immense contrôle sur l'enseignement primaire irlandais. Depuis plusieurs années, des débats ont lieu autour de cette question qui pour l'instant ne trouve pas de véritable réponse.

Le cycle primaire irlandais dure 8 ans. Les écoles dispensent en général 2 années de maternelle  suivies des classes appelées classe 1 à 6. L'enseignement primaire peut être dispensé dans une école publique (ou école nationale), dans une Gaelscoileanna, où l'enseignement est fait en langue gaélique, ou encore dans une école multi-confessionnelle, souvent ouverte à la demande de parents. À noter que "Educate Together", organisation non-gouvernementale fondée en 1984, est à l'initiative de la création de 74 écoles multi-confessionnelles dans le pays, et propose beaucoup d'idées pour repenser l'éducation irlandaise.

Les écoles nationales datent de l'introduction de l'enseignement public au début du 19 ème siècle dans le pays. Ce qui pose problème pour une partie de la population, c'est qu'elles sont le plus souvent dirigées par un comité sous patronage religieux, incluant souvent un prêtre local.

La plupart des écoles publiques sont de confession religieuse unique, la majorité d'entre elles étant catholiques.

Même si les enfants peuvent être dispensés de cours de religion et ne sont pas forcés d'y assister, des inconvénients sont à relever.

Souvent, les parents n'ont pas le choix de l'école où inscrire leur enfant à cause du peu d'offre disponible au niveau local, spécialement en zone urbaine. Les écoles sont surchargées et reçoivent trop de demande d'inscriptions.

C'est à ce moment-là qu'elles peuvent demander aux parents un certificat de baptême, afin d'accueillir en priorité les enfants catholiques, ce qui fait de plus en plus polémique au sein du pays.

Pour beaucoup de parents, inscrire leur enfant dans une école primaire catholique n'est pas un problème. Mais pour d'autres, obligés de baptiser à contrec?ur leurs enfants afin de pouvoir les inscrire dans les écoles, alors même qu'ils ne souhaitent pas élever leurs enfants dans la foi, cette situation n'est plus acceptable.

En effet, l'église a un quasi-monopole dans l'enseignement primaire en Irlande, et le constat est implacable : 90 % des 3200 écoles primaires de l'État sont sous le patronage de l'église catholique.

Dans la majorité des cas, l'Église détient également le bâtiment et s'occupe le plus souvent de la nomination du corps enseignant. Ces derniers sont bien souvent catholiques ou alors ont dû se baptiser afin d'obtenir l'emploi.

Ruairi Quinn, ancien Ministre de l'Éducation irlandais, explique dans les pages de l'Independent qu'il existe désormais 3 types de catholiques « les catholiques par conviction, par culture, et par contrainte ».

« Ce système semble désormais hors de propos et n'est plus en mesure de répondre aux besoins d'une société devenue multiculturelle, multi-ethnique, moderne et laïque »

Cette prééminence de l'Église dans le système éducatif primaire irlandais commence désormais à être de plus en plus remise en question par une frange de la société irlandaise.

Il y a d'ailleurs des signes qui ne trompent pas : en 2014, un tiers des mariages enregistrés en Irlande étaient des mariages civils, sans aucun lien avec la religion ou l'Église. De plus, le récent référendum sur le mariages pour les personnes de mêmes sexe est également un bon indicateur des changements sociaux en Irlande. En effet, 62 % ont voté « Oui » au référendum, alors que 90 % de la population est catholique selon le dernier recensement, et appartiennent donc à une institution largement opposée au mariage gay.

Pour se justifier sur le terrain de l'école, l'Église reprend l'argument selon lequel les parents consentent à l'éducation catholique du moment où ils inscrivent leurs enfants dans ce type d'école. Mais sans véritable alternative aux écoles catholiques, cet argument est difficilement recevable.

Les représentants religieux parlent souvent du « choix des parents »pour justifier un tel règne. Il est vrai que les communautés locales sont parfois réticentes à abandonner le modèle religieux. Cependant, la contestation est croissante au niveau national et international.

Plusieurs voix se sont notamment élevées au Comité des Nations Unies pour les droits de l'homme afin d'exprimer leur préoccupation concernant le manque d'écoles non-confessionnelles en Irlande.

Plusieurs solutions ont été évoquées depuis quelques années par les différentes associations parentales ou certains membres du gouvernement telle la suppression pure et simple du système de priorité à l'admission pour les enfants catholiques.

Également, beaucoup préfèreraient que les cours religieux soient en option au lieu d'obliger les élèves à s'en faire dispenser. 

Official Opening of Ballyfermot Library

Avec ces deux mesures, les écoles resteraient sous l'autorité catholique qui pourrait continuer à enseigner les cours religieux à ceux qui le souhaitent, tout en permettant à l'Église d'afficher un nouveau visage d'ouverture.

Mais cette évolution semble encore loin : Il y a quelques années, Diarmuid Martin, Archevêque de Dublin, déclarait : « Je vois très peu d'intérêt à être le patron d'écoles catholiques qui ne le sont pas vraiment ».

Certains citoyens plus virulents sur le sujet demandent le retrait total du contrôle de l'Église dans les écoles publiques, afin que celles-ci relèvent uniquement de la compétence de l'État. D'autres ajoutent que les écoles sont bien souvent financées en grande majorité par les finances publiques de l'État : les organisations religieuses ne sont donc pas légitimes pour en avoir le contrôle.

Dernièrement, la Ministre de l'Éducation Jan O'Sullivan s'était déclarée être contre le fait que certains enfants soient baptisés uniquement pour leur garantir une admission dans l'école : « Il y a sans doute une contrainte autour de la loi constitutionnelle que nous avons actuellement, mais cette situation n'est plus tolérable. Je pense qu'il est nécessaire d'organiser un débat sur le sujet ».

Ce sujet constitue donc l'un des prochains défis du pays, et Tom Collins, professeur à l'université de Maynouth, en donne un bon résumé : « Le vieux modèle de patronage religieux de l'école a été taillé dans la vigueur et l'ambition du 19 ème siècle. Ce système semble désormais hors de propos et n'est plus en mesure de répondre aux besoins d'une société devenue multiculturelle, multi-ethnique, moderne et laïque ».

Youri Nabbad (www.lepetitjournal.com/dublin), jeudi 20 août 2015 

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Publié le 20 août 2015, mis à jour le 21 août 2015

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