Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

LES RENDEZ-VOUS DE L’ÉCO - Lenny Martinez, Chef de produit au sein de ForestFinance France, maison mère basée à Bonn et filiale française en Aveyron

Écrit par Lepetitjournal Cologne
Publié le 12 octobre 2014, mis à jour le 14 octobre 2014

 

Ils ont planté plus de 3 millions d'arbres depuis 1995, s'insurgent contre les usines à bois de l'agriculture industrielle et jouissent de la reconnaissance d'institutions telles que l'ONU ou le WWF. Qui sont-ils ? Des activistes ? Une ONG ? Non. Le Groupe ForestFinance est un prestataire spécialisé dans l'éco-foresterie et les investissements agro-forestiers. L'idée est simple : l'argent des investisseurs sert à créer et protéger des forêts, les rendements proviennent de leur exploitation responsable, avec de premières formules à la portée d'un grand public. L'histoire est personnelle, elle commence par un voyage au Panama du fondateur Harry Assenmacher. L'entreprise, qui a des projets en Allemagne, au Panama, en Colombie, au Pérou et au Viêt Nam a créé en 2013 deux filiales en Suisse et en France. Lenny Martinez, le jeune bras droit de son dirigeant en France, nous parle avec passion de son métier.


Lepetitjournal.com : Comment êtes-vous arrivé chez Forest-Finance et quelles sont vos fonctions aujourd'hui ?

Lenny Martinez : Les questions de durabilité m'intéressaient déjà. Pendant mon stage de fin d'étude à Sciences-Po Strasbourg, j'ai travaillé dans une fondation d'entreprise sur les questions d'alimentation durable. Ayant suivi ma compagne à Berlin en 2013, j'ai accepté un autre stage à la Deutsche Umweltstiftung (DUS). Très vite j'ai rencontré ForestFinance qui est un partenaire de la DUS et le lien s'est fait avec Richard Focken, le Président de ForestFinance France. Aujourd'hui, je suis chef de produit de la société en France, née en janvier 2013. Notre gros travail est d'accroitre sa visibilité et de la développer, en essayant d'avoir un ancrage sur les forêts françaises.

Vous allez planter des forêts en France ?

Non, mais travailler avec de petits propriétaires forestiers. En France, les forêts sont très belles, mais il y a 3,5 millions de propriétaires, dont 2,8 avec un hectare ou moins de terrain et pour la plupart ils n'en font rien. Avec notre partenaire forestier le cabinet Coudert, nous créons un produit d'épargne : les versements de ce produit iront de pair avec un état des lieux pour chaque petite parcelle de forêt française. Au delà des éclaircies nécessaires, la forêt a d'autres valeurs qu'on peut exploiter durablement.

Vous avez des forêts au Panama, au Pérou, en Colombie. N'avez-vous pas l'intention d'investir au Brésil dans la forêt amazonienne ?

ForestFinance reste évidemment ouvert à d'autres pays, mais la question centrale pour nous est d'être propriétaires des terres et de ne pas faire de spoliation sur de petits producteurs comme il peut y avoir au Brésil.

Zone de protection près de la Finca La Paz en Colombie - successivement, les surfaces d'acacia mangium sont transformées en un tel biotope

Racontez-nous en quoi votre modèle diffère des monocultures de teck ?

Hormis sur la plantation d'acacias mangium, dont le but est d'enrichir le sol en nutriments pour ensuite planter une forêt mixte, une forêt ForestFinance comprend jusqu'à 7 essences locales différentes de bois nobles et de bois de construction telles que l'acajou ou l'amarillo. Comme nous prélevons sur chaque hectare environ 850 arbres durant les 25 ans, il y a beaucoup d'espaces pour des « nouveaux venus », des espèces indigènes provenant surtout de nos zones protégées (soit au minimum 15 % de nos terrains). La grande diversité composant ces forêts mixtes les rend beaucoup moins sensibles aux invasions parasitaires et aux maladies, contrairement à la monoculture qui, de plus, appauvrit le sol.

Quand j'achète un meuble avec le label FSC, est-ce la garantie que le bois a été exploité selon ce modèle, par éclaircies ?

Le standard FSC mesure beaucoup de facteurs importants notamment pour l'écologie et la démarche sociale, mais il n'exige pas des forêts mixtes ou une absence de coupe rase. Nous mettons plus en avant d'autres certifications tels que le Gold Standard, le standard climatique le plus réputé.

Qu'est-ce qui justifie votre pronostic de rendements plus que confortables de 4 à 6 % ?

Nous préférons communiquer sur des résultats que nous atteignons chaque année plutôt que sur des pronostics. En 2013, plus d'un million d'euros « d'intérêts » ont été distribués aux investisseurs du produit Green Acacia. La majorité des produits ne génèrent de revenus qu'après dix ans. Nos bois sont à forte valeur ajoutée, leur croissance est très rapide puisqu'en 22-25 ans ils arrivent à maturité. Nous travaillons en étroite collaboration avec des institutions scientifiques reconnues au niveau international. L'ANAM (Autorité Panaméenne de l'Environnement) examine régulièrement nos activités forestières. En juillet, nous avons inauguré une scierie au Panama : désormais, le bois issu des éclaircies sera transformé et raffiné sur place. Des perspectives de formation d'ouvriers qualifiés voient ainsi le jour pour les populations locales, et le secteur de la production locale s'en trouve renforcé.

Quelles craintes devez-vous avoir par rapport aux aléas climatiques ?

Notre principal risque, c'est quand les arbres sont tout petits et pas encore assez forts pour lutter contre les maladies. C'est pourquoi nous proposons à nos investisseurs une garantie de replantation sur les cinq premières années.

Est-ce que sur place on vous accueille à bras ouverts ?

En Colombie, où nous avons le plus de surface (12.000 ha), c'est un joint venture avec deux vieilles familles locales. Nous intégrons au maximum les communautés et travaillons avec des appuis locaux, notamment les universités avec lesquelles nous menons des projets de recherche. Il faut savoir aussi s'adapter, instaurer la confiance, laisser le temps au temps. Harry Assenmacher est lui-même sur place quatre mois par an, ce rapport personnel est très important.

Quels sont vos défis dans l'exportation de votre modèle vers la France ?

Nous travaillons à une nouvelle page d'accueil pour adapter notre communication, avec un site web moins compact et plus joueur. Un projet sera aussi de produire un « chocolat neutre » lors de la COP21* à Paris. En Allemagne, les ventes ont été très orientées sur le marché en ligne de nos produits (épargne, cadeaux, objets). Nous allons continuer ici, mais développer en même temps des partenariats. Avoir un acteur fort, qui soutient nos projets, c'est une peur en moins quand il s'agit d'investir dans des arbres à l'autre bout du monde ! Notre devise, c'est de dire : « Pour une fois, votre engagement écologique va vous faire gagner de l'argent ».

Propos recueillis par Astrid Nierhoff (www.lepetitjournal.com/cologne) Lundi 13 octobre 2014

* NDLR: 21e conférence climat dont la France sera l'hôte en 2015.

     
    
     

logofbcologne
Publié le 12 octobre 2014, mis à jour le 14 octobre 2014

Flash infos