ÉCONOMIE - Le centre commercial AEON, un succès immédiat ?

Le nouveau et premier  centre commercial japonais AEON Mall au Cambodge pose beaucoup de questions : est-ce que ce supermarché géant peut connaître un succès immédiat ?  Est-il seulement destiné à exposer des produits de grandes marques à des prix exorbitants ? Faut-il attendre encore cinq ou dix ans pour en tirer profits ? Le regard de notre média partenaire khmer Thmey Thmey

Dès l'ouverture provisoire, des milliers de clients cambodgiens se sont rués vers ce supermarché. Le Premier ministre Hun Sen, lui-même,  a également exprimé sa fierté quant à la présence de ce groupe japonais.

Le centre qui est climatisé, équipé partout d'ascenseurs et qui regroupe de nombreuses boutiques célèbres, avec son parking très large et les entrées conformes au standard international, a attiré l'attention de la clientèle cambodgienne et de certains étrangers qui l'ont visité sans tarder.

Selon la liste commerciale du centre, les magasins et boutiques inscrits s'élèvent à 186 dont 75 % venant de l'étranger (49 magasins et restaurants japonais, 21 magasins européens et 9 magasins américains) alors que les magasins qui portent la marque du pays sont 42. Tous ces commerces se trouvent déjà à Phnom Penh et la plupart d'entre eux sont des banques, des restaurants, des cafés, des magasins d'habillement, des supérettes, des salons de beauté, des centres de divertissement et des écoles.

Vu la présence considérable de la clientèle et que la majorité des produits sont ceux de marques célèbres dans le monde et dans le pays, on s'étonne si l'ouverture de cette grande surface japonaise est couronné de succès ? Est-ce que les produits de grandes marques qui sont exposés dans cette surface commerciale visent seulement à gagner leur reconnaissance aux yeux de la clientèle cambodgienne et il faut attendre encore cinq ou dix ans pour en tirer les profits ? Est-ce que sa présence peut porter atteinte à la clientèle des marchés modestes et des supermarchés cambodgiens ?

Quelques analystes estiment qu'à court terme la grande surface japonaise aura du mal à connaître le succès espéré en raison des produits à prix élevé par rapport au niveau de vie de la population cambodgienne. Bien qu'un petit nombre d'habitants ait la possibilité d'acheter des produits de grandes marques, les riches cambodgiens ont l'habitude voyager en Thaïlande, en Malaisie ou en Singapore, et d' en profiter pour acheter ces produits de marque. Il est donc impossible de changer leur habitude et de les inciter à acheter ces produits de luxe dans le pays d'un seul coup.

En somme, à court terme, la grande surface japonaise AEON Mall est seulement considérée comme une surface de divertissement, elle n'est pas encore un vrai centre de consommation. Cependant à long terme, la présence de ce centre est une stratégie commerciale appropriée. Pour que les produits de marques s'inscrivent dans la mémoire de la clientèle cambodgienne dans l'avenir, les grands investisseurs étrangers doivent implanter leur investissement dès maintenant, même s'ils ne peuvent pas encore titrer profit.

D'un autre côté, on peut se demander si la présence de ce centre commercial japonais porte atteinte à la clientèle des marchés modestes et des supermarchés cambodgiens ? Les impacts négatifs ne sont pas considérables et certains analystes socio-économiques au Cambodge souligne plutôt que la grande surface japonaise donne une bonne image au pays et qu'elle permet aux grandes compagnies étrangères d'exploiter le marché cambodgien pour vendre leurs produits. Par contre, pour que le Cambodge bénéficie considérablement des profits de ses activités économiques et que le pays puisse contrer les flux des produits étrangers, il faut tripler sa production et créer ses propres marchés, que ce soit sous une image modeste ou moderne, pour vendre ses bons produits aux étrangers. C'est une bonne approche pour le compte de la population cambodgienne et en faveur de l'économie du pays.

Les marchés modestes ou les supermarchés qui vendent les produits spécifiques cambodgiens pourraient être les marchés les plus intéressants pour les visiteurs étrangers. Plus de quatre millions d'étrangers qui visitent ce pays chaque année ne veulent pas acheter des produits étrangers sur le marché cambodgien. Ils souhaitent plutôt acheter des produits locaux. Quand les étrangers achètent des produits cambodgiens, les Cambodgiens bénéficient des profits. Quand les Cambodgiens achètent des produits étrangers, ce sont les étrangers qui en bénificent. Acheter un produit cambodgien contribue à créer un emploi pour un travailleur cambodgien. Plus les étrangers achètent nos produits, plus nous gagnons.

Est-ce que le Cambodge devrait créer ses propres marchés où sont vendus ses produits locaux pour les visiteurs étrangers et les immigrés, ou devrait-on attendre de voir les marchés étrangers présents dans le pays attirer la clientèle cambodgienne ? Autrement dit le Cambodge ne devrait-il pas encourager les investissements des marchés des deux catégories en même temps ?

Ky Soklim - www.lepetitjournal.com/cambodge - Jeudi 10 juillet 2014