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ENTRETIEN - Nicolas Triboi, paysagiste : "Bucarest possède un gros potentiel"

Écrit par Lepetitjournal Bucarest
Publié le 14 avril 2013, mis à jour le 14 avril 2013

Dans une capitale de plus en plus dédiée à la circulation automobile, l'art d'aménager l'espace urbain est à première vue le cadet des soucis des autorités. Pourtant, le paysagisme s'impose peu à peu comme une discipline considérée de façon moins superflue. Entretien avec Nicolas Triboi, paysagiste français.

Photo : J.M.

Lepetitjournal.com/Bucarest - Existe-t-il un marché pour le paysagisme en Roumanie ?
Nicolas Triboi -
Sur Bucarest, il existe des entreprises qui s'occupent des jardins individuels, et qui marchent très bien. Mais à côté de ça, le marché du paysagisme plus conceptuel, celui lié à l'agriculture ou à la conservation de la nature est bien moins dynamique. Aujourd'hui, il y a de nombreuses incohérences sur le marché car il n'existe pas de vraie concurrence. Et puis il n'y a pas beaucoup de concepteurs, c'est-à-dire de paysagistes qui puissent offrir des démarches sensibles pour l'aménagement d'un terrain. On importe par exemple des plants d'Italie ou de Hollande pour les revendre le plus vite possible. Le paysagiste devrait connaître les producteurs locaux pour éviter ce genre de situation. L'exemple des rouleaux de gazon en ville est significatif : on en met au printemps, et tous les ans, on recommence. En France, on ne voit ça nulle part.

Le marché est donc encore insignifiant...
Pas vraiment. Il existe un marché et beaucoup d'argent. Il y a des appels d'offres importants mais qui sont complètement confisqués par un réseau de grosses entreprises. Les budget alloués au verdissement sont énormes, surtout à Bucarest. Mais dans quelles conditions? Certaines mairies ont installé des bancs dans les parcs tous les trois mètres... Ailleurs, on achète des arbres qui coûtent chers mais qui sont mal plantés. Un arbre de quatre ou cinq mètres de haut doit être planté dans un trou de 10 m3. Ici, on fait un trou de 30 cm sur 30 cm. Du coup, l'arbre tient un an, un an et demi tout au plus, après il meurt. Comme c'est une discipline nouvelle, on accepte toutes les erreurs. Mais ça sent souvent la corruption.

La politique d'aménagement des espaces verts en Roumanie est toutefois très récente, non ?
Oui. Il y a cinq ans à Bucarest, il n'y avait aucun souci des espaces verts et peu d'investissements. Aujourd'hui, c'est bien plus rempli. Je ne dirais pas plus beau, mais plus rempli. Car il y a ce souci d'organiser l'espace public pour montrer que l'on prend soin de la ville. La démarche qualité est toutefois rare.

Le paysagisme n'est donc pas tout à fait compris par les autorités ?
Pas vraiment. Le paysagisme, c'est comme l'architecture. On voit bien la différence entre un bâtiment créé par un architecte et un autre fait par un constructeur. A Bucarest, il y a eu quelques actions intelligentes mais dans beaucoup d'endroits, on a l'impression d'être dans une république dictatoriale où l'on construit des fontaines monumentales. Et ça, c'est un peu dommage.

Qui sont vos clients ?
C'est très varié. J'ai autant de commandes publiques que de projets à plus petites échelles, comme l'aménagement de jardins ou de balcons. Ces dernières années, nous avons eu beaucoup de projets liés à l'aménagement du territoire, à l'agriculture et au tourisme. Et dans un pays un peu vierge comme la Roumanie où rien n'est indiqué, où derrière une petite forêt, on peut tomber sur un monastère du 16ème siècle par pur hasard, il y a beaucoup de choses à développer. En France, nous sommes presque arrivés à l'extrême inverse. Tout est trop balisé. Je pense que la crise va être bénéfique pour la Roumanie car elle va forcer les gens à réfléchir à des circuits touristiques dans des endroits qui ont été laissés de côté. Jusqu'à maintenant, on construisait un immeuble sans avoir à réfléchir au développement des environs car il se vendait bien. Du coup, Bucarest n'est pas reconnue pour être touristique alors qu'elle possède un gros potentiel. Tout est à découvrir. Propos recueillis par Jonas Mercier (www.lepetitjournal.com/Bucarest) lundi 15 avril 2013

 

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Publié le 14 avril 2013, mis à jour le 14 avril 2013

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