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CHRISTOPHE POMEZ - ''La salle Elvire Popesco défend le cinéma européen''

Écrit par Lepetitjournal Bucarest
Publié le 10 juillet 2016, mis à jour le 10 juillet 2016

Après cinq ans passés en Roumanie, deux en tant que directeur de l'Institut français de Cluj et trois comme directeur délégué de l'Institut français de Bucarest (IFB), Christophe Pomez tire sa révérence pour aller continuer sa carrière d'attaché culturel au Maroc. Passionné de cinéma, il aura été l'un des moteurs de la transformation de la salle de spectacle de l'IFB, Elvire Popesco. Spécialisation dans le cinéma, augmentation des spectateurs, diversification de la programmation, création d'une équipe de professionnels... il nous raconte quelle a été la recette de ce changement.

Photo : Christophe Pomez

Le Petitjournal.com/Bucarest - De la salle de spectacle de l'Institut français de Bucarest à la salle de cinéma que tous les Bucarestois connaissent aujourd'hui, on peut presque dire qu'Elvire Popesco a connu une métamorphose complète. Elle est d'ailleurs devenue stratégique dans le paysage culturel de la capitale, qui ne compte quasiment plus aucune salle de cinéma indépendante. Par où cette transformation a-t-elle commencé ?

Christophe Pomez - Quand je suis arrivé à Bucarest, la salle avait bénéficié de travaux. C'est d'ailleurs la première du réseaux culturel français de l'étranger à avoir été numérisée. J'ai donc bénéficié d'un outils assez formidable qui proposait à la fois de la projection 35 mm et des conditions de projection en numérique. D'un point de vue technique, Elvire Popesco est donc devenue très intéressante dans le paysage culturel bucarestois. En parallèle, j'ai observé qu'il existait suffisamment de salles de théâtre à Bucarest. Nous avons avons donc décidé de spécialiser la salle dans le cinéma. Et dès sa réouverture, en 2012, nous avons commencé à travailler sur les publics.

Concrètement, comment vous avez fait pour vous imposer dans le paysage culturel local comme salle de cinéma et non plus comme salle de spectacles vivants ?

D'abord avec une programmation commerciale, du jeudi au dimanche. Et j'ai essuyé de belles critiques au départ. On m'a dit : ''comment ça ! on ne programme pas que du film français à l'Institut ?''. Eh bien non. L'idée a été de travailler sur quelque chose qui dépasse le cinéma français. Nous avons été labellisé par le réseau Europa Cinémas et nous sommes devenus ce qui, en France, pourrait se qualifier de salle art et essai.

Qu'elles sont les cinématographies les plus représentées en Roumanie ?

La première est la cinématographie américaine, avec 9,5 millions d'entrées par an. En deuxième vient la française, avec presque 500.000 billets vendus. Et enfin la cinématographie roumaine avec moins de 300.000 entrées par an. J'ai toujours appris qu'il fallait être à l'écoute du cinéma national avant d'aller vers d'autres cinématographies. L'idée était donc d'offrir une dimension artistique qu'on ne retrouvait pas dans les autres salles de Bucarest, en particulier les multiplex, et défendre le cinéma européen.

C'est un vaste objectif dans un pays qui enregistre l'un des taux les plus bas de l'Union européenne en termes de fréquentation des salles obscures...

Ca a justement été notre premier objectif  : augmenter la fréquentation du cinéma. Et on a réussi. Nous avons réalisé presque 30.000 entrées pour le premier semestre, soit plus que toute l'année 2014. En 3 ans, nous avons presque triplé le nombre de billets vendus. De 15.000 en 2013, à 30.000 en 2014 et presque 50.000 l'année dernière. Pour 2016, nous sommes déjà à plus de 40% d'augmentation. Nous sommes dans une phase ascendante parce que nous avons réussi à structurer une équipe de professionnels. Ca n'a l'air de rien, mais il faut savoir que pour faire tourner un cinéma, il faut des projectionnistes ? il n'existe plus de formation de ce genre en Roumanie ?, un responsable de la programmation, qui est en relation avec les distributeurs, un chargé des publics et enfin des personnes à l'accueil. En plus, j'ai une collègue chargée de mission pour l'audiovisuel dont le travail est de convaincre les distributeurs roumains d'acheter des films européens.

Et une fois cette équipe mise en place, qu'elles ont été vos démarches pour attirer de nouveaux spectateurs ?

Certaines salles sur Bucarest annulent la projection s'il n'y a pas suffisamment de spectateurs. Nous, nous avons décidé de passer les films indifféremment du nombre de billets vendus. Nous avons donc assuré une régularité. Après nous avons travaillé sur le développement des publics. Par exemple, en proposant des séances jeune public le samedi matin. Dernièrement nous avons aussi travaillé sur des nocturnes, en proposant des séances le vendredi et samedi soir à 22h.

La collaboration entre la France et la Roumanie dans le domaine du cinéma ne se résume pas qu'à la salle Elvire Popesco. Un nouvel accord entre les deux pays a d'ailleurs été signé lors du festival de Cannes...

Oui, un accord de coopération a été signé par les deux ministres de la Culture, en mai. Et ce document regroupe tous les volets de coopération du cinéma. Il existait déjà un accord, signé en 2009, mais il ne concernait que les coproductions. Cette fois-ci, nous avons voulu montrer que c'est un secteur lié à des emplois et à de l'économie, qui peut aussi impliquer des investissements privés. Cet accord explore par ailleurs l'éducation, les salles, le patrimoine, les formations... Bref, un peu tous les maillons de la chaine. L'enjeu de cette politique de coopération est de permettre à la Roumanie de créer son propre écosystème cinématographique.

Propos recueillis par Jonas Mercier (www.lepetitjournal.com/Bucarest) Lundi 11 juillet 2016

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Publié le 10 juillet 2016, mis à jour le 10 juillet 2016

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