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J’AI TÉSTÉ POUR VOUS – Le bus à Yangon

Écrit par Lepetitjournal Birmanie
Publié le 26 octobre 2016, mis à jour le 27 octobre 2016

Se déplacer en bus dans Yangon, pourquoi pas ?
Je le fais bien en France. Ce matin, par exemple, destination l'Institut Français de Birmanie, sur Pyay Road, au départ de la vieille ville.

Faut déjà trouver le bus en question? De prime abord, rien d'impossible : les bus fumants, freinant, suant gaz et diesel animent le flot des véhicules de leurs hurlements sonores jusqu'au c?ur historique de Yangon.

Certes, mais lequel prendre ?
Pas de site internet genre RATP, bien sûr ! Pas d'équivalent de la RATP d'ailleurs : si le parcours des lignes dépend de l'autorité de régulation des transports de la ville (YCDC), les lignes elles-mêmes sont opérées par des sociétés privées, qui monnayent auprès de diverses compagnies de bus le droit d'exploiter la ligne. Conséquence : deux bus desservant le même chemin, bien loin de collaborer, rivalisent pour obtenir la clientèle. D'où queues de poissons, double et triple files, cris et klaxons, bagarres parfois, embouteillages souvent, inconfort toujours? Un système si peu efficace qu'il est désormais remis en question par les autorités, en quête d'amélioration des transports urbains.

J'ai appris à déchiffrer les spaghettis qui servent de nombres ici et je repère les numéros une fois dans la rue : 124, 35, 57, 43... Quelle ligne pour Pyay Road ? Mes voisins l'ignorent : comme la plupart des habitants de Yangon, ils ne connaissent que leur propre parcours ? numéros, trajets, correspondances? - et vivent allègrement dans la plus profonde indifférence des autres voies. Comme je suis sur Anawrahta Road, le plus simple parait de monter dans le premier bus venu et de descendre quand nous croiserons Pyay Road, ou avant si nous quittons cet axe central du vieux Yangon qu'est Anawrahta Road.

Je me joins à un attroupement dont je suppose qu'il marque un arrêt de bus. S'il existe quelques abribus dans la ville, ils restent rares ; et bien que plusieurs grandes stations clairement marquées accueillent les bus, ceux-ci prennent surtout leurs passagers à la volée, sur un signe. Une sorte de minibus freine, bondés ; ce qui n'empêche pas son contrôleur de s'époumoner en direction des clients potentiels. Personne ne bouge. Un plus gros bus double le petit, regain de cris et de gesticulations. Fi de la rouille qui constellent la fort ancienne dernière couche de peinture dont ce véhicule a joui, je suis le flux et je monte. Nous sommes entassés, et en cela Yangon ne diffère pas de Paris, Londres ou Hong-Kong?

Au début du couloir, grosse dispute : le contrôleur réclame 500 kyats pour le billet, loin des 200 kyats du coût unitaire légal quelle que soit la distance parcourue. Les passagers protestent mais l'homme n'en démord pas ; le chauffeur s'en mêle et je saisis des mouvements et cris que les mécontents peuvent descendre ; tout le monde reste? et paient les 500 kyats ! Les conflits entre passagers, contrôleurs et chauffeurs sont pléthores et dégénèrent parfois gravement. Voilà quelques mois, des réguliers d'une ligne ont attrapé un chauffeur qui les avait particulièrement malmenés la veille et l'ont brulé vif !

"Parmi les Birmans, le bus a mauvaise réputation"
Longues attentes, accélération violente, freinage abrupte, le tout ponctué de coups de klaxons et de passages en force forment le cycle standard de la conduite urbaine du Birman moyen ; à l'intérieur du bus, je m'accroche pour ne pas tomber : la brusquerie des chauffeurs suscite de nombreux accidents. Cet été, une femme debout pas loin du chauffeur a été expulsée du bus lorsqu'il a tourné sans ménagement. Elle en est morte. Dans la cohue, je me félicite d'avoir utilisé mon déodorant ce matin mais regrette amèrement que la plupart des autres passagers n'ont pas fait de même. Les fenêtres grandes ouvertes n'apportent que peu d'air, faute de vitesse.

Je constate que les dames évitent soigneusement mon voisinage. Des amies m'ont confié que beaucoup d'hommes profitent de la foule pour s'adonner à des attouchements mal venus, certains allant même jusqu'à menacer leur victime avec un couteau pour la contraindre au silence ! Alors les femmes essaient autant que possible de rester entre elles. Parmi les Birmans, le bus a mauvaise réputation, constituant un mal nécessaire mais mal aimé.

Ah, nous tournons, le moment de descendre. Pas besoin, le bus se dirige maintenant vers Pyay Road en fait. A l'arrêt Taw Win Centre, il se vide. Souriant, un monsieur me propose de m'asseoir à son côté. L'éternelle gentillesse des Birmans? Durant les 20 minutes suivantes, il cherche à me faire la conversation dans un mélange de birman et d'anglais que je saisis mal. Sourires et gestes participent largement à la conversation. Jusqu'à ce que nous passions l'hôpital Mahar Myaing. Je descends là, tout près de l'Institut. Coup de chance, ce bus est presque direct ; numéro 124 ; à retenir pour le retour.
E.G. (www.lepetitjournal.com/Birmanie) Jeudi 27 Octobre 2016

 

lepetitjournal.com birmanie
Publié le 26 octobre 2016, mis à jour le 27 octobre 2016

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